Marion Dubois

Comment avez-vous intégré les escape games à vos pratiques pédagogiques ?

Depuis mes débuts dans l’enseignement, le numérique m’intéresse. C’était le sujet de mon M2 : les outils numériques et la mémorisation. À force de voir tous les projets inspirants des collègues sur les réseaux sociaux, j’ai eu envie de m’y mettre aussi.

Je me suis lancée pendant le confinement. Mes élèves sont plutôt bien connectés, donc j’ai eu la chance de ne pas avoir trop de décrochage à cette période, mais je sentais tout de même une lassitude de leur part. Je devais mettre en place quelque chose pour relancer la motivation et combattre le découragement. J’ai suivi quelques webinaires en ligne, et j’ai créé un premier jeu. C’était un escape game numérique très simple, avec une pièce unique et cinq petites énigmes. Pour créer le décor de l’escape game, j’ai utilisé le site Genial.ly, et pour les petites énigmes, je suis passée par Learning apps.

L’idée était de faire réviser le programme de géographie. On y suivait un géographe, qui avait un manuscrit à écrire, et qui découvrait un jour en entrant dans son bureau que celui-ci avait été volé. Les élèves devaient tenter de rassembler le manuscrit pour sauver la publication. Pour cela, ils devaient résoudre des énigmes, toujours en rapport avec la géographie.

J’ai ensuite adapté le jeu à tous les niveaux de classe que j’avais. Le succès a été au rendez-vous tout de suite, les élèves ont adoré. Donc, j’ai voulu aller encore plus loin.

Vous avez donc élaboré un second projet d’escape game ?

C’est surtout à la demande des élèves que je me suis lancée dans ce second projet. Ils avaient adoré l’escape game et me demandaient de recommencer. Le problème était que j’avais déjà passé énormément de temps à créer ce petit jeu tout simple. Donc, j’ai décidé de créer un second escape game, peut-être plus complexe, mais avec les élèves cette fois-ci !

Dans cette deuxième version, c’étaient en effet les élèves qui étaient chargés de créer les énigmes. Pour les classes de cinquième, j’avais moi-même imposé le scénario : se promener dans le château de Versailles, et trouver tout un tas d’informations historiques et géographiques pour mettre en valeur le pouvoir du roi. 

Quant aux quatrième, qui étaient très motivés, je leur avais laissé la main pour l’écriture d’un petit scénario. J’ai donc eu trois scénarios différents pour mes trois classes de quatrième. Il y a eu un voyage dans le temps, un jeu autour de la vie de Marcel Proust, car ma collègue de français avait travaillé dessus avec eux. Et le dernier était une uchronie : Napoléon III avait réussi à prolonger indéfiniment le Second Empire, et il fallait découvrir comment il avait fait pour permettre à l’empire de perdurer jusqu’à aujourd’hui.

Comment s’est organisé le travail entre les élèves sur la création de l’escape game ?

J’ai réparti les rôles entre les élèves : une petite équipe était chargée d’écrire le scénario, de me proposer quelques visuels simples, un enchaînement de pièces ou de lieux dans lesquels on allait pouvoir placer les énigmes. Le reste de la classe a composé des petits jeux, quiz et applications via le site Learning apps. Nous les avons ensuite intégrés à différents points dans l’histoire du jeu. 

Les cinquième n’ont créé que les énigmes. De mon côté, j’ai conçu un décor assez large, un château avec de nombreuses pièces, presque exactement similaire au vrai château de Versailles. Nous avons ensuite choisi où cacher les énigmes, dans les tableaux, dans les murs…

Ces énigmes devaient porter sur les notions apprises en cours durant l’année ?

J’avais effectivement demandé qu’ils choisissent des thèmes du programme traité en classe. Et naturellement, ne serait-ce que pour piéger leurs camarades et rendre le jeu plus difficile, ils ont choisi les thèmes les plus complexes, ou les définitions les plus compliquées. La répartition s’est faite naturellement, et ça a permis de réviser une grande partie de ce qu’on avait étudié dans l’année. 

Vous avez d’ailleurs animé un atelier au CLIC sur ce projet.

Tout à fait, j’ai fait un retour sur le projet et sur l’idée de faire créer le jeu par les élèves. En effet, c’est vraiment intéressant et ludique de créer un escape game, mais c’est très long, donc y investir les élèves permet de rentabiliser le temps de création.

J’ai aussi présenté des pistes d’amélioration, comme inclure quelques collègues dans le projet de création, en français par exemple ou en langues vivantes.

Quels conseils donneriez-vous à un enseignant qui souhaite créer son premier escape game ?

Ce serait d’accepter de faire très simple au début, car c’est long à mettre en place. Par la suite, ce serait d’utiliser toutes les inspirations qu’il peut trouver, notamment sur les réseaux sociaux. Sur Twitter, il y a par exemple le collectif S’cape, qui m’a beaucoup aidée.