Dans un rapport publié en juin 2024, intitulé « Rationaliser l’orthographe du français pour mieux l’enseigner », le Conseil scientifique de l’Education nationale (CSEN) fait des préconisations concernant l’accord du participe passé avec avoir, lorsque le complément d’objet direct est antéposé. « Les performances des élèves français en orthographe sont loin d’être satisfaisantes » note le CSEN. Et « les erreurs les plus nombreuses concernent l’orthographe grammaticale, le cas le plus notoire étant celui de l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir et le complément antéposé (maîtrisé par moins de 20% des élèves en fin de primaire) ».
Moins de 20% des élèves maîtrisent cette règle
Pour le CSEN, il est « inutile de s’acharner à enseigner des orthographes maîtrisées par une minorité de francophones ». C’est le cas de la règle de « l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir et le complément antéposé. Cette règle, « qui va à l’encontre de la règle générale selon laquelle le verbe s’accorde avec le sujet, n’est maîtrisée que par peu d’enfants en fin de primaire (moins de 20%) et elle tombe en désuétude chez les adultes » précise le CSEN.
Une nouvelle règle avec avoir
Il préconise donc : avec l’auxiliaire avoir, invariabilité du participe passé et avec l’auxiliaire être, accord systématique avec le sujet. Pour le CSEN, « ces deux choix libéreraient énormément de temps en classe, qui pourrait être consacré à des enseignements portant plus généralement sur la production écrite ».
Le débat sur la simplification de l’orthographe est très vif au sein de la communauté éducative. Dans l’interview qu’il nous avait accordée en février dernier, Gilles Siouffi, professeur en Langue française à Sorbonne Université, spécialiste d’histoire de la langue française, plaidait pour une simplification de l’orthographe et plus spécifiquement de l’orthographe grammaticale.
80 heures de cours rien que sur l’accord du participe passé
Il souhaitait ainsi la « suppression de l’accord du participe passé avec avoir quand le complément direct est placé avant le verbe (ex : les pâtisseries que j’ai mangées). Cette règle a été introduite au XVIe siècle en imitation de l’italien, mais elle n’existe quasiment plus en italien aujourd’hui. Elle a été suivie de beaucoup d’exceptions qui font que la règle n’est souvent plus respectée aujourd’hui. Il n’y a presque pas de situations où cet accord est utile à la compréhension. Ce sont seulement des cas anecdotiques, avec enchaînement d’antécédents – comme “la part du gâteau que j’ai mangé(e)” – qui seraient concernés. On remarque d’ailleurs que l’ambiguïté existe au présent (« la part du gâteau que je mange »), et que ça ne gêne apparemment personne. »
Enfin, comme pour le CSEN, pour le professeur de langue française, réformer cette règle de l’accord du participe passé permettrait une « diminution du nombre d’heures consacrées à l’orthographe ». Gilles Siouffi indique en effet qu' »on estime à 80 heures aujourd’hui le temps passé à l’apprentissage de l’accord du participe passé et de ses exceptions au collège. »
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