En France, les inégalités sociales déterminent le parcours scolaire dès le plus jeune âge. Image : Getty

Un nouveau rapport publié par France Stratégie met en lumière l’origine sociale comme facteur déterminant dans la réussite – ou l’échec – scolaire des élèves. Les données étudiées montrent un fort déterminisme social qui est de surcroît entretenu à chaque étape de la scolarité, remettant en cause l’égalité des chances censée être garantie par l’Education Nationale.

« La dépendance de la réussite scolaire au milieu socioéconomique et culturel des élèves français figure parmi les plus élevées des pays de l’OCDE. Même avec de bons résultats en début de scolarité, les enfants de famille modeste ont des parcours en moyenne plus heurtés, aux débouchés nettement moins favorables » explique d’emblée l’étude.

Des inégalités dès la petite enfance

 Les autrices du rapport observent d’abord des différences dans les compétences acquises au sein de la famille chez les jeunes enfants ; des capacités qui influent ensuite sur l’apprentissage à l’école, en accord avec la logique selon laquelle « les compétences engendrent les compétences. »

Ainsi, les enfants des milieux favorisés ont un vocabulaire plus riche que leurs futurs camarades de classe issus de milieux plus modestes, et ce dès l’âge de 2 ans. Concernant les facultés sociocomportementales, les enfants d’origine modeste développent davantage de traits comme « l’inattention, l’impulsivité, un biais pour les récompenses immédiates et des difficultés pour identifier et attribuer les émotions. »

Alors que l’accueil collectif pourrait compenser ces écarts, seulement 5 % des enfants de moins de 3 ans d’origine défavorisée sont accueillis en crèche (contre 22 % des enfants de milieux aisés). Les inégalités se consolident à l’école élémentaire, où l’on observe plus ou moins de progrès en fonction des milieux : sur 10 élèves en difficulté en CP, 6 élèves de milieux très défavorisés le seront toujours en CM2, contre 3 élèves d’origine favorisée.

Dans le secondaire, l’enjeu de la mixité sociale

Au collège, les élèves d’origine sociale défavorisée présentent des résultats plus faibles que les autres, et les écarts se creusent de la sixième à la troisième, en particulier en mathématiques. Ils sont aussi beaucoup plus nombreux à être dirigés vers les sections Segpa, destinées à lutter contre le décrochage.

En cause notamment : une mauvaise mixité sociale. Par le biais des classes de niveau, ou d’options privilégiées par les élèves favorisés, comme le latin, « les collégiens favorisés comptent dans leur classe deux fois plus de camarades d’origine aisée que les élèves des classes moyennes et populaires n’en ont. » Cette « ségrégation scolaire » peut réduire les chances des élèves modestes de s’inscrire dans le supérieur par la suite.

Au lycée, l’orientation diffère selon l’origine sociale, et ne dépend pas que des résultats scolaires : en 2007, les élèves favorisés ayant obtenu entre 8 et 10 au contrôle continu du brevet étaient 66% à demander une seconde générale et technologique, contre 30 % des enfants d’ouvriers non qualifiés ayant obtenu les mêmes notes. Un phénomène qui s’explique entre autres par les projections des parents sur leurs enfants, mais aussi des professeurs et des élèves eux-mêmes.

Les résultats du baccalauréat montrent ensuite de forts écarts entre les élèves de différentes origines sociales, avec 62 % des enfants d’ouvriers non qualifiés qui décrochent leur baccalauréat (dont 34 % dans la filière générale et technologique), contre 94 % des enfants de cadres (dont 85 % dans la voie GT).

Les classes prépa, réservées aux élèves d’origine aisée ?

Dans le supérieur, la différenciation continue, et est particulièrement marquée dans les filières d’excellence : seuls 17 % des bacheliers généraux avec de bons résultats issus d’un milieu défavorisé entreront dans une CPGE l’année suivante, contre 43 % pour les élèves avec les mêmes notes, mais dont un parent au moins est diplômé du supérieur. Idem pour les grandes écoles : « le taux d’accès aux grandes écoles des élèves de catégories socioprofessionnelles défavorisées est de 1,6 %, contre 16 % pour ceux de catégories socioprofessionnelles très favorisées. »

Les conclusions de l’étude devraient bientôt être complétées par « un rapport commandé par l’Assemblée nationale relatif aux politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes. »