Malaurie Princet, gagnante de MMM180Pouvez-vous nous présenter votre parcours jusqu’au concours MMM180 ?

J’ai un parcours un peu atypique, et si, il y a 17 ans, on m’avait dit que je finirais prof, j’aurais ri ! Je voulais être dramaturge au départ, donc j’ai commencé une fac de théâtre à Paris. J’ai tenu 3 mois… Je suis vite retournée dans le Sud, où j’ai travaillé à l’usine. Puis j’ai fait de la restauration, je me suis occupée de personnes âgées à domicile, tout ça aux quatre coins de la France. J’ai ensuite eu mon fils et suis entrée comme assistante d’éducation dans un lycée pro pour bénéficier des vacances scolaires. J’y ai rencontré des gens fantastiques, et je me suis dit qu’être prof en lycée pro, c’était bien aussi. On pouvait faire du français, de l’histoire… et c’est un public qui me plaisait parce que j’avais fait une formation dans l’éducation spécialisée. Et j’ai repris mes études de la licence 2 jusqu’au master 2 par correspondance.

Vous avez remporté l’édition 2019 de Mon Mémoire MEEF en 180 secondes. Pourquoi avoir souhaité participer à ce concours ?

Ça me tenait à cœur de valoriser à mon niveau le lycée professionnel, souvent dénigré et qui souffre encore d’une mauvaise image, qui n’est pas forcément vraie. On peut y mener des projets vraiment intéressants, les élèves de lycées pro ne sont pas stupides ! Donc cela me faisait plaisir de montrer qu’on pouvait y monter quelque chose d’ambitieux.

En plus, peu d’enseignants de lycée professionnel s’inscrivent à ce concours, il s’agit souvent de profs des écoles ou de certifiés. Alors que le lycée pro représente un tiers des lycéens !

Pouvez-vous nous parler du mémoire grâce auquel vous avez remporté le concours ?

J’ai choisi le thème des stéréotypes de genre après la Journée internationale des violences faites aux femmes. J’avais mes élèves le lendemain pour une séance d’EMC et j’ai voulu me servir de cette actualité. Nous étions encore dans la mouvance #balancetonporc, donc la conversation a un peu dévié. La classe était exclusivement féminine ce jour-là, les deux garçons étaient absents, et je me suis rendu compte qu’elles ne savaient pas ce qu’était un viol, par exemple. L’une m’a dit cette fameuse phrase sur le viol conjugal : « si c’est mon mari, ce n’est pas un viol ».

Je ne souhaitais surtout pas heurter les convictions des élèves, qui étaient religieuses et culturelles, mais je voulais quand même leur ouvrir un autre possible. Après un épisode chez le concessionnaire marqué par les stéréotypes de genre, j’ai choisi ce thème pour ma séance d’EMI quelques temps plus tard. Je me suis beaucoup documentée sur les stéréotypes de genre, ce qui m’a fait arriver aux origines du genre avec les travaux de l’anthropologue Françoise Héritier.

Que signifie cette victoire pour vous ?

J’étais très heureuse pour le lycée pro (et aussi pour moi-même !)

Et si ma victoire peut faire un peu bouger les mentalités sur le sexisme, j’en suis fière. Dans ma classe, elles étaient 4 à penser que le viol conjugal n’existait pas. J’ai réussi grâce à mon projet à les faire changer d’avis, ça a été ma plus belle victoire !

Que pensez-vous de l’EMI tel qu’il est enseigné aujourd’hui ?

Justement il n’est pas enseigné ! Il y a des professeurs qui ne se sentent pas concernés par l’EMI alors qu’il est complètement transdisciplinaire. Les médias sont présents dans nos classes, sur les portables des élèves par exemple. Ce ne sont pas forcément les bons médias, mais les élèves n’ont pas les outils nécessaires pour faire un tri objectif dans les informations. Pour moi, il devrait chaque année y avoir un projet d’EMI dans les lycées, qui regrouperait tous les profs et tous les élèves d’une classe.

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