Synthèse du rapport de la Cour des Comptes intitulé « L’éducation prioritaire, une politique publique à repenser ». Image : Getty

Dans un rapport publié mardi 6 mai 2025, la Cour des Comptes dresse le bilan de la politique d’éducation prioritaire. Intitulé L’éducation prioritaire, une politique publique à repenser, le rapport pointe du doigt de nombreuses insuffisances. En introduction de ce rapport, la Cour des Comptes déplore que « la France fasse partie des pays de l’OCDE dans lesquels le niveau scolaire des élèves issus de milieux plus défavorisés est en baisse depuis vingt ans et les inégalités sociales pèsent le plus sur les destins scolaires ». Pourtant souligne le rapport, depuis 1981, une politique d’éducation prioritaire est bien menée sans discontinuité. Par ailleurs, pour favoriser l’attractivité, les indemnités pour les enseignants exerçant en éducation prioritaire ont également été augmentées.

Alors comment expliquer de tels résultats ?

Une carte non revue depuis 10 ans

L’éducation prioritaire indique le rapport « concerne aujourd’hui 21 % des élèves et s’appuie sur une carte qui n’a pas été revue depuis dix ans ». Cette carte ne correspond donc plus aux réalités socio-économiques actuelles. Elle a en effet été revue en 2015, lors de la refondation de l’Ecole de la République.

La refondation de 2015 comprenait une refonte de l’éducation prioritaire avec la mise en place des réseaux REP et REP+. Pour rappel, explique le site du ministère de l’Education nationale, « les REP+ concernent les quartiers ou les secteurs isolés connaissant les plus grandes concentrations de difficultés sociales ayant des incidences fortes sur la réussite scolaire » et les REP sont « plus mixtes socialement mais rencontrent des difficultés sociales plus significatives que celles des collèges et écoles situés hors de l’éducation prioritaire. »

Et précise encore le ministère, à la rentrée 2023, on comptait « 1 093 réseaux composant la carte de l’éducation prioritaire : 731 collèges et 4 136  écoles en REP, 362 collèges et 2 459 écoles en REP+. « 

Les réseaux REP et REP+ sont construits autour « d’un collège et des écoles du secteur accueillant le même public. » Avec la refondation de 2015, analyse la Cour des Comptes, « les objectifs de l’éducation prioritaires ont été précisés, le rôle du collège comme tête de réseau a été réaffirmé et une concentration de moyens sur le noyau dur des REP+ a été entreprise. » Or, on note par exemple « le caractère souvent limité de la collaboration entre l’école et le collège. »
Par ailleurs, « la réduction du nombre d’élèves par classe en éducation prioritaire était trop limitée pour être efficace. » La Cour des Comptes note que ce dédoublement « a certes amélioré le climat scolaire et l’attention consacrée aux élèves les plus en difficulté ». Mais malheureusement, « l’effet sur les résultats des élèves est plus mitigé et les progrès observés à l’école  » s’estompent « d’ici l’entrée au collège. »

Enfin, « l’insuffisance des effectifs de personnels médicaux, paramédicaux et d’assistants sociaux » est également problématique.

Quelles améliorations possibles ?

Pour la Cour des Comptes, le problème fondamental de la politique d’éducation prioritaire consiste à allouer des moyens sans un réel pilotage ni suivi. « Depuis dix ans, la logique de moyens a prévalu au détriment des autres mesures en faveur de la réussite des élèves » note ainsi la Cour des Comptes dans son rapport. Ainsi, explique-t-elle, « le coût de la politique d’éducation prioritaire a été multiplié, pour l’État, par 2,5 en près de 10 ans (1,1 M€ en 2014 ; 2,6 Md€ estimés en 2023) ».
Malheureusement, cela ne s’est pas accompagné d’une refonte de la carte de l’éducation priotaire tous les quatre ans, comme cela aurait dû être le cas. Ni d’une évaluation réelle des dispositifs mis en place, tels que « Plus de maîtres que de classes » par exemple, créé en 2012, jamais évalué, et remplacé en 2017 par le dédoublement des classes de GS, CP et CE1.
De plus, la création de nouveaux dispositifs supplémentaires, tels que les contrat locaux d’accompagnement (CLA) ont rendu la carte de l’éducation prioritaire illisible.

Résultat : les écarts de résultats entre les élèves de l’éducation prioritaire et les autres ne diminuent pas. L’objectif de les réduire « à moins de 10 % » n’est toujours pas atteint.

La Cour des Comptes suggère donc « une logique d’action plus globale, plus efficiente et davantage intégrée, au service de la réussite des élèves. » Elle préconise une réforme « sans délai » de la politique d’éducation prioritaire.