Maths
fotolia.com

Les élèves de Terminale, qui étrennent le nouveau bac cette année, ont dû abandonner l’une de leurs trois spécialités à l’issue de leur année de 1ère. Si la spécialité mathématiques était la plus prisée (69% l’ont choisie en 1ère en 2019), elle est aussi fortement délaissée en Terminale (40% d’abandons). Il faut dire que le tronc commun en 1ère ne comporte que 2 h hebdomadaires d’enseignement scientifique regroupant les maths, la physique-chimie et la SVT et est rarement dispensé par des professeurs de mathématiques. Par ailleurs, aucune option, en 1ère générale, ne porte sur une discipline scientifique. Une raison qui peut expliquer le plébiscite de la spécialité. « Les élèves sont très étonnés qu’il n’y ait pas de mathématiques à part entière dans le tronc commun. L’enseignement scientifique correspond à de la culture scientifique et les maths y sont plus au service des autres matières », lance Nathalie Roth, professeure de mathématiques au lycée Douanier Rousseau à Laval et membre de l’association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (APMEP).

La spécialité maths plébiscitée en 1ère

Certains ont donc choisi la spécialité par goût, en raison de leurs bons résultats, des conseils de leurs professeurs, de leur projet post-bac, mais aussi parfois de peur qu’un arrêt prématuré de cette discipline ne leur porte préjudice. « Je pense que ça peut nous fermer des portes si on arrête les mathématiques dès la seconde. C’est une discipline universelle, une valeur sûre comparée aux nouvelles matières qui nous sont proposées », confirme Félicie, en Terminale à Paris. Si elle se destinait à suivre un bac L option maths, avec la réforme, en 1ère, elle s’est donc reportée sur les spécialités Maths ; Humanités, littérature et philosophie (HLP) et Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques (HGGSP) en vue de faire des études en sciences politiques par la suite.

Des profils et des niveaux très variés

Avec beaucoup de travail, Félicie a réussi son année de spécialité maths, mais elle concède  que bon nombre de ses camarades ont rencontré des difficultés. Outre des conditions d’enseignement bouleversées par le confinement et les cours à distance, les profils des élèves inscrits en spécialité maths sont très variés. « Nous n’avons qu’une offre possible en mathématiques pour l’ensemble des 1ère. C’est ça ou rien. Si bien que des élèves qui auraient été en filière S ou ES auparavant, avec des programmes différents et adaptés à leurs besoins, sont désormais réunis. Les hétérogénéités de niveau sont accentuées », constate Nathalie Roth. Ainsi, certains se destinent à des études scientifiques poussées et choisiront 9h de maths en Terminale (spécialité math + options maths expertes) quand d’autres prendront simplement l’option maths complémentaires (3h hebdomadaire) ou arrêteront même cet enseignement.

Un programme très dense

Afin que chacun y trouve des connaissances utiles à ses futures études, le programme de 1ère balaye beaucoup de points et se montre ambitieux. Il va, par exemple, plus loin en trigonométrie et la fonction exponentielle qui était abordée en Terminale S l’est désormais en 1ère. « Les élèves ont du mal à trouver une motivation pour chaque point abordé et nous manquons de temps pour leur montrer toutes les applications possibles. Cela entraîne du découragement chez eux. Nous avons la sensation de maltraiter ceux qui ont besoin de temps pour comprendre et assimiler ces connaissances », regrette la professeure. Le dilemme se pose alors pour les enseignants : avancer pour finir le programme ou prendre plus de temps pour que les élèves comprennent. « Ils ne se sentent pas toujours capables de poursuivre en terminale. On aimerait qu’une partie du tronc commun soit dédiée aux maths ou qu’il y ait une spécialité pour ceux qui veulent faire des études scientifiques et une pour ceux qui ont besoin des maths à un niveau plus accessible. Mais on nous répond qu’il ne faut pas reconstituer les filières. Pourtant, il ne s’agit pas de ça », commente l’enseignante.


L’option maths complémentaires : une alternative concurrente

Toutes ces raisons peuvent justifier les 40% d’abandons de la spécialité en 2020. Mais l’existence d’une option maths complémentaires en Terminale, dédiée aux élèves qui cessent la spécialité, est une autre explication. Dans le lycée où exerce Nathalie, il y avait ainsi cinq groupes de spécialité maths en 1ère. En Terminale, il en reste deux et deux groupes se sont créés en maths complémentaires. L’enseignement y est fait sous forme de thématiques, avec un programme plus accessible. « Ce n’est pas du tout la même charge de travail. C’est moins difficile et moins rapide », glisse Félicie qui a choisi cette option. De son côté, Chania, lycéenne en Seine-et-Marne, a aussi fait ce choix et conservé en spécialités la physique-chimie et la SVT. « Même si nous n’avons cette matière que 3 h par semaine, cette option me suffit pour faire des études de médecine. J’aurais pu abandonner la SVT mais le fait qu’il y ait cette option a tout arrangé », déclare-t-elle. Même constat pour Lola. « Je souhaite faire Pass médecine ou CGPE BCPST (prépa véto). On m’avait prévenue que la spécialité physique-chimie sans les maths serait très compliquée. Pour ma part, ça ne s’est pas vraiment confirmé. La spécialité maths est celle dans laquelle j’ai eu les meilleurs résultats en 1ère mais je l’ai abandonnée car je savais que j’aurais la possibilité de prendre maths complémentaires. C’était le choix qui me semblait le plus judicieux et celui qui m’ouvrirait le plus de portes », explique Lola. Sur le bulletin officiel de l’Education nationale, il est ainsi indiqué que cette option permet à ceux qui en ont besoin « de compléter leurs connaissances et compétences mathématiques par un enseignement adapté à leur poursuite d’études dans l’enseignement supérieur, en particulier en médecine, économie ou sciences sociales ».

L’orientation en question

Mais selon les projets (prépa maths, par exemple), l’option reste insuffisante. Il importe donc de bien se renseigner sur les attendus des filières post-bac visées, ce qui n’est pas toujours évident lorsque l’on ignore ce que l’on souhaite faire. La question de l’orientation reste sensible face à des établissements qui vont accueillir les premiers diplômés du nouveau bac. « Certains élèves peuvent intégrer des parcours avec l’option maths complémentaires. Mais suivant les attendus, ils peuvent représenter un infime taux dans ces établissements et se retrouver avec des élèves qui ont pris maths expertes. Il leur faudra alors fournir un travail supplémentaire pour compenser. En prépa vétérinaire, les écoles préfèrent parfois prendre des élèves qui ont un bon niveau en maths car il leur sera plus difficile de leur faire récupérer ces connaissances ensuite. Certains élèves qui ont pris physique-chimie et SVT peuvent alors être moins bien placés », prévient l’enseignante. Les admissions sur Parcoursup devraient donner dans quelques mois de plus amples indications sur les débouchés qu’offrent ces spécialités.