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La plateforme de formation e-INSPÉ s’adresse à tous les enseignants : les étudiants des INSPÉ et les nouveaux enseignants mais également les enseignants plus expérimentés. Image : Getty


Depuis quand la plateforme e-INSPÉ existe-t-elle et pourquoi a-t-elle été créée ?

La plateforme a été financée en 2020 pour une durée de dix ans. C’est une initiative interministérielle qui s’inscrit dans le cadre de France 2030, avec l’idée d’expérimenter de nouveaux formats de formation et d’autoformation, à distance mais aussi hybrides.
Concrètement, chaque parcours comporte cinq étapes. Les quatre premières sont asynchrones et chacun se forme individuellement à son rythme. La cinquième se déroule en classe virtuelle, en direct avec un formateur. Ce temps d’échange permet de revenir sur la mise en pratique et d’ancrer les apprentissages.

À qui s’adresse-t-elle ?

Au départ, la plateforme visait les étudiants des INSPÉ et les nouveaux enseignants, y compris les contractuels. Mais on voit aujourd’hui arriver des enseignants plus expérimentés, qui cherchent à se former ponctuellement sur des sujets précis, dans des formats courts et souples. Nous voulions vraiment proposer des parcours modulables, adaptés aux contraintes de temps des enseignants.

Combien de formations sont disponibles aujourd’hui ?

D’ici à 2027, nous nous sommes engagés à livrer au minimum 70 parcours. À ce jour, une cinquantaine sont déjà en ligne. Ils couvrent à la fois des savoirs disciplinaires et des thématiques transversales : éthique, différenciation en classe, citoyenneté européenne… Les parcours vont de la maternelle au lycée général, professionnel et technologique.

On imagine que des thèmes comme la gestion de classe sont souvent demandés…

Oui, très souvent. Par exemple, il existe un parcours sur la structuration du temps en maternelle, qui aborde aussi la gestion de groupe. D’autres travaillent la différenciation, l’accueil des élèves allophones… Ce qui est important, c’est que toutes les formations s’appuient sur le travail d’un binôme chercheur-enseignant. Cela garantit à la fois un ancrage scientifique et une dimension très concrète. À la fin de chaque parcours, les participants repartent avec des fiches de préparation, des supports à télécharger et parfois un carnet de bord à compléter. On tient beaucoup à cette dimension pratique.

Les formations reposent donc sur des supports variés…

Oui. On y trouve des vidéos, des articles de recherche, des quiz, des tableaux, des témoignages d’enseignants et des séquences filmées en classe. Certaines vidéos sont même tournées à 360°, pour plonger l’apprenant dans une situation réelle d’enseignement ou de cour de récréation.
Chaque parcours dure environ 5 à 6 heures. L’objectif est de favoriser l’engagement : alterner théorie et pratique, donner envie d’apprendre et de transférer rapidement en classe ce qu’on a découvert en ligne.

Pouvez-vous nous détailler les cinq étapes d’un parcours ?

Bien sûr. La première étape, « Découvrir », présente la problématique et les apports de la recherche sur le sujet. Elle dure une trentaine de minutes. La deuxième, « Approfondir », permet d’aller plus loin, sur environ une heure et demie. Vient ensuite « Analyser », autour de deux heures. Les participants y observent des séances de classe, croisent théorie et pratique et réfléchissent à leur propre posture. La quatrième étape, « Mettre en pratique », les invite à imaginer comment ils appliqueraient les acquis dans leur classe. Enfin, la cinquième est une classe virtuelle d’une heure en direct, en groupe, pour échanger sur les expériences, les difficultés et les idées de chacun.

L’intelligence artificielle a aussi fait son entrée dans vos parcours. Comment ?

Oui, nous avons développé un chatbot intégré, d’abord testé sur un parcours consacré à l’empathie, et désormais déployé sur presque tous. L’apprenant peut lui poser des questions de compréhension, demander une reformulation ou des pistes de séquences pédagogiques. L’outil s’appuie sur un corpus fermé, celui des contenus validés de la plateforme, pour garantir la fiabilité des réponses.
Chacune d’elles est accompagnée de ses sources : intervenants, extraits de formation… C’est essentiel pour la transparence et la légitimité scientifique. On parle vraiment d’un assistant de parcours, pas d’un générateur de réponses toutes faites.

La fréquentation a bondi de 168 % depuis le début d’année. Comment l’expliquez-vous ?

Nous avons davantage communiqué sur l’existence de la plateforme sur les réseaux sociaux comme LinkedIn, bientôt sur Instagram, mais aussi lors de rencontres avec les INSPÉ. Et puis, la plateforme a pris de l’ampleur. Elle a ouvert en septembre 2023, et avec 50 parcours aujourd’hui, elle atteint une masse critique qui la rend plus attractive. Le bouche-à-oreille entre pairs fonctionne aussi. Les chiffres montrent un vrai intérêt : on vient d’atteindre 25 000 inscrits, avec une fréquentation en hausse constante.

La flexibilité des formations explique sûrement aussi ce succès…

Exactement. Le temps de formation des enseignants est contraint, donc le fait de pouvoir se former à son rythme, le soir, le week-end ou pendant les vacances, est un vrai atout. C’est une liberté précieuse, surtout pour ceux qui souhaitent se perfectionner sans attendre une formation institutionnelle.

Les INSPÉ ont-elles bien accueilli cette offre ?

Cela a pris un peu de temps, mais oui. Il fallait clarifier que e-INSPÉ ne concurrence pas les formations proposées localement, mais les complète. Les parcours permettent d’aborder certains sujets autrement, avec des formats innovants et une temporalité plus souple. Tout est validé par un conseil éditorial et pédagogique (avec des membres du réseau des INSPÉ, de la DGESCO et de l’IGÉSR) et un conseil scientifique. La plateforme a donc toute sa place dans le paysage de la formation des enseignants.

Quels sont les prochains chantiers ?

D’abord, finaliser les 70 parcours prévus d’ici 2027. Ensuite, mieux faire connaître la plateforme : rappeler, par exemple, qu’elle est ouverte à toutes les adresses mail, pas seulement académiques. On veut aussi renforcer l’expérience d’engagement des enseignants, continuer à garantir la qualité des contenus et accompagner la réforme des concours de recrutement. L’idée, c’est que e-INSPÉ devienne un outil commun à tous les acteurs de la formation, au service d’une profession toujours en évolution.