
« Des profs au rabais », un « profond mépris »… Plusieurs syndicats s’insurgent de l’initiative lancée par le rectorat de Dijon pour pallier le manque de professeurs de français dans l’académie : permettre aux enseignants d’autres disciplines de prendre en charge cette matière, après avoir passé un entretien de 30 minutes.
10 minutes de présentation et 20 minutes d’échange
Dans un mail adressé aux enseignants et dévoilé par la secrétaire générale du SNES-FSU Sophie Vénétitay sur BlueSky, les IA-IPR de Dijon annoncent en effet le lancement d’une « expérimentation dans le but de trouver de nouvelles solutions pour assurer l’enseignement du français dans les classes de collège et de lycée de notre académie » : proposer à d’autres professeurs de prendre en charge cet enseignement, via la création d’une attestation « Enseigner le français ». Cette « attestation académique » sera « mise en place à titre expérimental dans l’académie de Dijon à compter de la rentrée 2025 » et aura pour objectif, selon l’académie, de « permettre à des enseignants titulaires du second degré, ayant suivi des études littéraires à un moment donné de leur parcours de formation initiale, d’assurer un enseignement du français dans le second degré », et surtout « dans les classes de collège ».
Pour y prétendre, les candidats intéressés devront remettre un rapport présentant entre autres leurs « expériences d’enseignement, éventuellement en Lettres » et « tout autre élément tangible marquant l’intérêt du candidat pour la discipline Français et son enseignement ». Ils passeront ensuite un entretien, durant lequel ils effectueront, devant une commission de validation et pendant 10 minutes, une « présentation, générale, d’une séquence », et une présentation « détaillée d’une séance déjà menée ou envisagée ». Cet exposé sera suivi d’un échange de 20 minutes.
« Le vrai problème est en fait dans le recrutement »
Un dispositif qui ne convainc pas les syndicats. Pour Maxime Lacroix, secrétaire académique de l’UNSA Dijon, cité par Libération, « ce sont des profs au rabais ». Il rappelle qu’« après seulement un entretien rapide, ils pourront potentiellement enseigner jusqu’au bac de français ».
Quant au SNES-FSU, il a adressé ce 23 mai aux IPR de l’académie une lettre ouverte exprimant sa « profonde consternation » face au dispositif. « Les professeurs de Lettres modernes et de Lettres classiques sont-ils si peu de chose qu’on puisse ainsi pourvoir à leur remplacement par des collègues des autres disciplines ? Savoir parler français n’est-il donc finalement que la seule vraie nécessité pour pouvoir l’enseigner ? » interroge le syndicat, qui souligne que l’expérimentation « va être reçue par les enseignant·es de Lettres comme un affront, si ce n’est une marque de profond mépris ». Il craint également que celle-ci s’étende à d’autres disciplines. « Allons-nous également être sollicités pour enseigner en EPS, Education musicale, en Histoire-Géo, en Technologie, en Mathématiques ? » questionne-t-il.
Dans Libération, Philippe Bernard, cosecrétaire académique du Snes-FSU Dijon, estime que « le vrai problème est en fait dans le recrutement : ce métier n’attire plus car il n’est plus reconnu et pas valorisé financièrement ». Selon des chiffres cités par France 3 Régions, une soixantaine de classes de collège sont actuellement sans enseignant de français.
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