Philippe Vanroose est conseiller pédagogique EPS de la circonscription de Neufchâtel-en-Bray et chargé d’enseignement à l’UFR STAPS de Rouen, après avoir effectué une parenthèse professionnelle de 9 ans dans une société de délégation de service public de gestion d’établissements sports-loisirs. Précédemment, il a occupé les fonctions de Conseiller pédagogique départemental EPS (Seine-Maritime) et de chargé de mission pour le Ministère de l’Éducation Nationale. Philippe Vanroose est aussi membre du comité éditorial des éditions EP&S et contributeur du magazine Salto Mag.
Philippe Vanroose

Aujourd’hui, où en est-on de l’EPS dans le premier degré ?

L’enseignement physique et sportif représente aujourd’hui trois heures de cours par semaine dans l’emploi du temps des élèves. Or, en réalité, la situation est bien différente : le temps de pratique est nettement inférieur. Il varie plutôt entre 1 heure 30 et 2 heures : généralement 2 séances de 45 minutes par semaine. Cette baisse s’explique notamment par l’éloignement des infrastructures sportives, la météo, le manque de matériel… et plus récemment à cause d’une forte pression pour l’enseignement des disciplines fondamentales (français et mathématiques). Le temps moyen de pratique par semaine est donc relativement faible quand nous connaissons les bénéfices que cette discipline peut apporter aux enfants sur la santé et l’amélioration des résultats scolaires. Toutefois, pour les élèves qui désirent faire davantage de sport, ils peuvent s’inscrire à l’association sportive scolaire de leur école via des associations et clubs sportifs.

Y-voyez-vous une régression de l’EPS ?

Il ne s’agit pas d’une régression mais plutôt d’un non-respect des horaires officiels. Cela est dû à un autre frein, celui de la gestion du groupe classe. L’EPS est une discipline qui se pratique dans un lieu autre que celui de la salle de classe, sur des espaces plus grands et plus ouverts tels que les gymnases, les terrains de sports ou même en forêt. Il y a une certaine crainte de la part des enseignants du premier degré de ne pas arriver à maîtriser son groupe classe… Cette raison peut donc les décourager à dédier du temps à la pratique de l’EPS.

Faut-il intégrer l’EPS aux enseignements fondamentaux ?

Absolument, et je milite pour que ce soit le cas ! Aujourd’hui encore, cette discipline ne fait toujours pas partie du socle des enseignements fondamentaux, à savoir lire, écrire, compter, respecter autrui, alors que c’est une matière essentielle pour les enfants à la fois en termes de santé mais aussi de qualité des apprentissages. Toutes les enquêtes internationales montrent que les élèves qui pratiquent une activité physique régulière réussissent mieux à l’école. Il y a donc urgence à intégrer l’enseignement physique et sportif dans les savoirs fondamentaux.

Cours EPS
Cours EPS

Justement, quels sont concrètement les bénéfices de l’EPS sur les enfants ?

Pour un enfant, pratiquer une activité physique et sportive permet la constitution d’un capital santé. C’est en effet dès le plus jeune âge que ce capital se construit. L’activité physique est essentielle pour diminuer les risques cardiovasculaires ou de diabète et améliorer l’état musculaire et osseux. Au-delà de la santé, l’activité physique améliore la concentration à l’école et la mémoire ce qui permet à l’élève d’obtenir de meilleurs résultats scolaires. 

La Fédération française de cardiologie alerte sur l’augmentation de la sédentarité chez les jeunes. Que préconisez-vous pour y remédier ?

Dans un premier temps, il faudrait déjà respecter les trois heures d’EPS par semaine écrits dans les programmes officiels ! Puis, modifier ses habitudes de vies telles que son mode de déplacement, car la voiture est souvent le moyen de transport le plus privilégié. À titre d’exemple, certaines écoles ont développé un dispositif intitulé « pédibus ». Il s’agit d’un mode de ramassage scolaire pédestre. L’enfant attend à un arrêt qu’un groupe de marcheurs et de parents accompagnateurs volontaires viennent le chercher pour se rendre à l’école. C’est un moyen efficace pour faire pratiquer une activité physique aux enfants. Il existe aussi des dispositifs liés aux sports scolaires, en complément de l’EPS, qui permettent de faire pratiquer davantage les élèves, avec notamment l’USEP, union sportive de l’enseignement du premier degré.

L’inactivité contribue aussi à la progression du surpoids des enfants…

En effet, en France, 20% des adolescents sont en surpoids. Ce chiffre est lié notamment à deux problématiques : le manque d’activité physique et les mauvaises habitudes alimentaires. Ces jeunes en effet ne bénéficient pas toujours d’une alimentation équilibrée et ont recourt à la restauration rapide ou à des plats tout préparés. Il faut apprendre à mieux manger et se dépenser et pratiquer une activité physique régulière pour éviter le surpoids ou tout autre maladie. L’organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande d’ailleurs 1 heure d’activité physique par jour.

Quelles pistes pour améliorer l’enseignement de l’EPS à l’école ?

Les programmes scolaires sont plutôt bien conçus mais il faudrait en améliorer la lisibilité. Globalement, le ministre ne nous éclaire pas assez sur ce qu’il veut faire de l’EPS. Un rapport de la Cour des comptes met en avant un certain nombre de propositions pour accompagner les professeurs des écoles dans la pratique de l’EPS. Une me paraît intéressante : demander aux professeurs d’EPS du second degré d’intervenir dans les écoles sans se substituer aux enseignants des écoles. C’est une solution qui pourrait permettre aux enfants de faire davantage de sport.