Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Jean-Marc Dumontet : je suis producteur de spectacles et directeur de plusieurs théâtres à Paris (Théâtre Antoine, Théâtre Libre, Bobino, Point Virgule, Grand Point Virgule). Mon entreprise est également présente partout en France, en diffusant les spectacles que nous produisons en tournée et en assurant la gestion déléguée des théâtres de Saint-Malo. J’ai créé plusieurs festivals, dont « Paroles Citoyennes » est le dernier-né. 

Antoine Mory : je suis le directeur artistique du festival « Paroles Citoyennes », créé en 2018. J’assure à ce titre la programmation et la coordination artistique du festival. 

Cette année aura lieu la 4e édition de Paroles citoyennes. A l’origine, quelles raisons vous ont poussé à lancer un tel festival ?

JMD : l’envie de consacrer un temps fort de programmation, dans nos théâtres, aux écritures contemporaines et aux sujets sociétaux. Le théâtre est le miroir d’une société. A ce titre, il nous interroge, nous interpelle. Les auteurs et les artistes de théâtre portent un regard unique sur le monde et sur nos grands questionnements collectifs. Nous souhaitons leur donner la parole et donner la parole au public. Imaginer une sorte d’agora où la parole des artistes et celle du public se répondent. 

L’édition 2021 aura lieu en ligne. Pourquoi était-il important que l’événement se tienne malgré la situation sanitaire ?

JMD : d’abord parce que la création artistique ne s’est pas arrêtée ! Avant le début de la crise sanitaire, de magnifiques spectacles ont été créés, dont la diffusion a été brutalement interrompue. Il fallait continuer à les montrer au public. Et de nouveaux spectacles ont vu le jour pendant les confinements, qui aujourd’hui sont prêts. Nous devions les proposer au public. 

AM : et puis parce que la situation sanitaire nous maintient éloignés les uns des autres. Et qu’il nous semble indispensable de maintenir le lien entre nous, de proposer des oeuvres porteuses de sens et de renouer le dialogue, par des rencontres exclusives avec des artistes. 

Quelles seront les spécificités et les temps forts de cette édition ?

JMD : la première spécificité, c’est la captation et la diffusion en direct des pièces de théâtre et des lectures depuis la scène de nos théâtres. Nous donnons rendez-vous, à distance certes, à tous les spectateurs, pour vivre les émotions du théâtre. Concrètement, cela suppose de transformer nos théâtres en lieux de tournage : cinq caméras, dont une caméra mobile qui s’approche au plus près des comédiens, et une réflexion sur la « transposition » du théâtre à la caméra. 

Deuxième particularité : l’ensemble des spectacles et des lectures seront suivis de rencontres, elles aussi en direct depuis les plateaux des théâtres, avec les équipes artistiques et de grands témoins de la société civile. Nous prendrons les questions du public, posées par des formulaires spécifiques mis à leur disposition sur le site de la soirée, et nous dialoguerons avec eux. 

AM : tout au long de ce festival, nous présenterons des textes très forts, qui feront écho à la situation actuelle et nous amènent à nous projeter : Jacques Weber rappellera le rôle fondamental de l’artiste en lisant les Discours de Suède, d’Albert Camus, Cristiana Reali nous fera partager les combats de Simone Veil, dans l’avant-première du spectacle qui lui sera consacré la saison prochaine, Lambert Wilson et Andréa Bescond liront une très belle pièce de Laurent Seksik consacrée à la Commune de Paris, dont nous célébrons le 150ème anniversaire. 

La thématique du festival cette année est « A la recherche de nos héros ». Pourquoi ce choix ?

JMD : parce que nous avons désespérément besoin de héros en ce moment ! 

AM : et parce que nous voulons montrer, dans cette programmation, qu’il existe, à côté de grandes figures inspirantes comme Simone Veil ou Edward Snowden, des héros du quotidien, qui par leurs actions et leurs paroles, contribuent à « éviter que le monde ne se défasse », selon le mot célèbre d’Albert Camus. Le moment nous semble venu pour célébrer nos héros et nous rappeler ce que nous avons en commun.