Irons-nous bientôt au concert écouter des symphonies entièrement créées par l’intelligence artificielle ? Au sein de l’orchestre même, des musiciens en chair et en os joueront-ils aux côtés de collègues robots ( ce fut le cas en Suède, lors d’un concert en 2024) ?

Ce sont des questions que pose l’excellent podcast « Musique et IA » de France Musique proposé par Pierre-Yves Georges. L’Intelligence artificielle envahit déjà la sphère musicale : il est possible de créer de la musique en s’appuyant sur elle. Le podcast donne l’exemple de la plateforme de création musicale Suno AI, qui permet de créer des airs d’opéra, à partir d’un simple prompt. Le podcast teste ainsi “un air d’opéra en italien avec une voix de baryton” : et le résultat est assez bluffant !

Mais ce type de plateforme s’appuie aussi sur des modèles sur lesquels elle n’a pas les droits d’auteur. Pierre-Yves Georges cite l’exemple de la plateforme Suno, « entraînée avec des musiques protégées par le droit d’auteur », telles que les chansons du groupe ABBA. La plateforme est attaquée aujourd’hui par les grands labels musicaux, et en Europe, “l’AI Act”, la loi européenne sur l’intelligence artificielle, a été adoptée l’été dernier, pour donner un cadre contraignant et réglementé aux usages de l’IA. C’est la première loi sur l’IA qui existe.

Symphonies et voix d’opéra

Une autre question est posée : celle de la création de symphonie. Alors bientôt possible avec l’IA ? A ce jour cela semble bien compliqué. Car note Pierre-Yves Georges « si l’IA se base sur les modèles qu’elle a appris dans son corpus d’apprentissage, comment s’assurer qu’elle ne génère pas toujours les mêmes musiques ? ». En résumé, l’IA ne fait – aujourd’hui du moins- qu’imiter des modèles préexistants. Donc pas d’émotion, ni d’inventivité !

Geoffroy Peeters, professeur en sciences des données à Télécom Paris (IP Paris), explique également dans une interview en février dernier qu’ « il y a un réel besoin de faire de ces outils [d’IA] des modèles qui génèrent du contenu nouveau, et non simplement qui reproduisent ce qu’ils ont appris ».

Par contre l’IA pourrait être douée pour recréer des voix humaines. Un projet mené actuellement par une artiste plasticienne, Judith Deschamps, dans le cadre d’une résidence à l’Ircam, Institut de recherche et coordination acoustique/musique, au sein de l’équipe Analyse / Synthèse dirigée par Axel Roebel, vise à recréer la voix de Farinelli.

Est-ce que l’IA dans les décennies à venir ouvrira la voie à de nouvelles formes d’expressions musicales ? C’est bien possible, un peu comme ce fut le cas autrefois avec la musique électronique et les ordinateurs. En tout cas, d’après France Musique, « 35% des compositeurs contemporains disent avoir déjà travaillé avec l’IA. Plus de la moitié, même, chez les artistes de moins de 35 ans. » Et 43% des compositeurs, tous genres confondus, « estiment que l’IA peut les aider dans leur travail », voire ouvrir de nouvelles perspectives de création.

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