Andréa TAROT, médecin responsable de l’Unité de Soins Palliatifs du CHU de Clermont-Ferrand, a reçu le 15 mai le prix Casden du jeune chercheur 2024.

Pouvez-vous vous présenter et nous décrire votre domaine de recherche ?

Je suis Andréa Tarot, médecin et responsable de l’Unité de Soins Palliatifs au CHU de Clermont-Ferrand. J’exerce au sein de ce service depuis 2017.
Mon intérêt pour la détresse des patients en situation palliative a débuté dès ma thèse d’exercice, et depuis, tous mes projets de recherche ont été influencés par cette thématique.

Pouvez-vous nous en dire plus sur vos travaux récompensés par le Prix du jeune chercheur ?

Mon objectif avec cette recherche, qui a été honorée par le prix du jeune chercheur, est d’explorer les ressentis des médecins confrontés à la détresse des patients en situation palliative. Dans le cadre de mon master 2 de recherche sur la fin de vie, j’ai réalisé une étude préliminaire auprès des étudiants de la formation spécialisée en soins palliatifs (FST). Cette étude m’a permis de tester ma méthodologie de recherche et d’obtenir des résultats préliminaires sur cette question, que j’ai publiés l’an dernier.

L’étude a révélé cinq thèmes principaux concernant les ressentis des étudiants de la FST : un fort sentiment d’impuissance face à un patient en détresse ; le devoir d’agir et d’être dans l’action ; la difficulté à établir une relation avec un patient en détresse ; un sentiment de mise en danger envers soi-même ; et enfin, l’importance de créer un espace d’écoute et de relaxation pour les patients.

Pour mener cette recherche et parvenir à ces résultats, j’ai réalisé des entretiens d’environ 30 à 40 minutes via visio-conférence avec les participants, durant lesquels je les ai invités à partager des situations marquantes vécues face à un patient en détresse. Par la suite, je me suis rendue sur le terrain pour essayer de comprendre leurs expériences dans ces situations. Le point de départ de cette approche était de les aider à se replonger dans leurs souvenirs.

Depuis ma thèse d’exercice, j’ai eu la chance de bénéficier d’un solide soutien, notamment de la part du CHU de Clermont-Ferrand et de mon laboratoire de recherche. J’ai également pu mettre ma méthodologie à l’épreuve grâce à mon équipe de master 2.

Pourquoi ce sujet d’étude ?

Mon intérêt pour ce sujet d’étude est né de mon expérience auprès des patients et des professionnels de santé. J’ai souvent constaté un décalage entre les besoins des patients et les soins qui leur sont offerts. Ce phénomène semble largement influencé par le vécu des médecins. Même si, en tant que médecins, nous avons à cœur de fournir le meilleur pour nos patients, il était pertinent de se demander pourquoi une telle divergence existe entre les propositions de traitement et les besoins exprimés. J’ai remarqué que cela s’explique souvent par le fait que les médecins peuvent ressentir des émotions fortes et difficiles, sans disposer des outils nécessaires pour répondre à cette réalité.

Comment est perçue votre recherche par les autres médecins ?

La perception de ma recherche par les médecins est généralement favorable. Ils éprouvent une certaine curiosité, car la question du « ressenti » n’est pas souvent abordée dans leur pratique. C’est un aspect auquel ils ne sont pas habitués, ce qui peut susciter une certaine appréhension au départ. Toutefois, lorsque je leur présente les résultats, je remarque qu’ils se montrent plutôt satisfaits. Mon travail répond à un besoin : il apporte des explications sur ce qu’ils vivent et contribue à légitimer leur vécu.

Qu’est-ce que ce Prix représente pour vous ?

C’est une reconnaissance très valorisante qui signifie beaucoup pour moi. Ce prix me donne davantage de confiance dans le travail que je réalise, en soulignant l’importance d’un sujet qui suscite de l’intérêt. Il met en lumière une question sociétale cruciale, ce qui est particulièrement gratifiant en tant que chercheur, car cela montre que nos travaux répondent à un besoin réel de la société.

D’un point de vue financier, cette récompense constitue également une aide non négligeable pour le développement de mes recherches.

Qu’allez-vous faire de cette récompense ?

Grâce à ce prix, j’espère pouvoir intégrer davantage d’interdisciplinarité dans mon travail. Une fois que j’aurai recueilli plus de résultats et que je passerai à l’analyse, je souhaiterais organiser des ateliers avec des spécialistes de diverses disciplines, tels que des psychologues et des philosophes. Cette collaboration nous permettra de discuter de mes résultats de manière approfondie et d’enrichir notre compréhension collective. Ce prix sera un atout précieux pour mener à bien cette initiative.

Avez-vous d’autres projets ?

Oui, j’ai toujours de nombreux projets en cours ! Je fais partie d’un laboratoire de recherche pluridisciplinaire à l’UCA, qui mène une variété de projets, et j’y contribue activement.