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Article publié le 29 novembre 2021, mis à jour le 4 janvier

Dans une interview publiée aujourd’hui, mardi 4 janvier, par Le Monde, le recteur de l’académie de Paris, Christophe Kerrero, s’exprime au sujet du remplacement des enseignants absents. Afin de faire face à la vague Omicron, il indique avoir déjà recruté 80 contractuels, venant s’ajouter au vivier des 600 remplaçants de l’académie. Ces contractuels sont pour la plupart étudiants en licence, mais pas seulement. Le recteur indique avoir également recruté des parents d’élèves de niveau master. Enfin, il envisage aussi, si nécessaire, de faire appel aux enseignants retraités.

Fin novembre, les enseignants retraités de Seine-et-Marne ont été sollicités pour effectuer des remplacements. Nous avions interrogé Guislaine David co-secrétaire générale et porte-parole du Snuipp-FSU à ce sujet.

Le 23 novembre dernier, des enseignants retraités de Seine-et-Marne ont reçu un courrier de la directrice académique du département, leur proposant d’assurer des « missions d’enseignement » moyennant une rémunération « en complément des droits de pension ». En cause : le manque d’enseignants remplaçants en primaire. Le syndicat Snuipp-FSU est fermement opposé à cette mesure. Sa co-secrétaire générale et porte-parole, Guislaine David, répond à nos questions.

Des enseignants retraités ont récemment reçu un courrier leur proposant de reprendre du service. Pouvez-vous nous dire ce que contient ce document ?

C’est la Dasen de Seine-et-Marne qui a envoyé ce courrier aux retraités du département, et il y a aussi eu le même type de demande dans l’Eure-et-Loire. On sait que beaucoup de départements sont en tension, et ont des difficultés pour assurer les remplacements. Dans le courrier, il est dit clairement que la Dasen n’arrive plus à recruter de contractutels, qui sont par ailleurs nombreux à démissionner.

« L’étendue du département, la difficulté d’accès à certaines zones rurales, le nombre de petites écoles, sont tout autant de problèmes auxquels il faut rajouter les conditions imposées par le protocole sanitaire et qui ne facilitent pas le recrutement de personnels contractuels. […] Nous ne sommes pas actuellement en mesure d’assurer la présence d’un enseignant dans chaque classe du département. »

Courrier de la Directrice académique de Seine-et-Marne

Est-ce que c’est légal d’avoir recours à des enseignants à la retraite ?

C’est légal dans la mesure où ils sont rémunérés. Cette solution s’est déjà vue, il y a une dizaine d’années, quand les collègues prenaient leur retraite pus tôt : mais cela avait provoqué un tollé.

Les absences non remplacées sont-elles un phénomène nouveau ?

Chaque année, à cette période, il y a beaucoup d’absences d’enseignants malades. Il faut aussi garder en tête que c’est une profession qui est féminisée à 83% dans le premier degré, et que les femmes sont souvent celles qui prennent des congés lorsque leurs enfants sont malades – sans compter les congés maternité. C’est donc un phénomène qu’on connaît bien, mais la crise sanitaire et la crise du recrutement rendent plus difficiles les remplacements. Parfois, en quelques semaines, on a deux, trois, quatre remplaçants qui se succèdent devant la même classe.

Comment sont gérées les classes lorsqu’on ne trouve pas de remplaçant ?

En général, on répartit les élèves dans les classes. Mais ceci implique qu’on ne s’en occupe pas, il n’y a pas de continuité d’apprentissage. D’autres moyens sont utilisés : par exemple, il n’est pas rare qu’on fasse garder les élèves par une AESH (dont ce n’est pas le métier). Dans tous les cas, on fait garderie au lieu de faire classe aux élèves.

Quelles sont les solutions ? Quelles politiques éducatives doit-on mener pour faire face à cette crise ?

Le métier d’enseignant n’est plus un métier qui attire, notamment dans le premier degré, et encore moins dans le contexte actuel. Les démissions augmentent, que ce soit de la part de jeunes qui ont pourtant passé un concours difficile ou d’enseignants qui sont installés dans le métier depuis des années mais n’en peuvent plus des conditions de travail.

Il faudrait donc améliorer ces conditions de travail : on a encore des classes trop chargées, des postes des réseaux d’aides ou de psychologues qui sont supprimés alors qu’on en a besoin… Il y a aussi la question du salaire ; on est très loin de nos homologues européens. Aujourd’hui, avec un master, les étudiants préfèrent faire autre chose.

Il faudrait également augmenter les places aux concours. Plutôt que d’embaucher des contractuels ou des retraités, on aurait pu par exemple faire appel aux étudiants qui sont sur les listes complémentaires. Mais ça n’a pas été le choix du gouvernement de recruter des titulaires.

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