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« Ici, personne ne se juge, le travail est collectif est constructif »

Naoual Ouzitane, en terminale professionnelle Métiers de l’accueil au lycée Marcel-Dassault à Mérignac (Gironde).

« J’ai très vite compris que je m’épanouirais davantage dans une filière professionnalisante et qui me formerait à un métier de contact, relationnel. C’est ce que j’aimais. En discutant avec des copines, en me renseignant, je me suis intéressée au lycée professionnel. En troisième, j’ai fait un mini-stage dans l’hôtellerie-restauration. Une journée d’immersion au lycée de Gascogne à Talence (Gironde) pour découvrir, échanger. Je me suis rendue compte que ce secteur d’activités était dur, physiquement et moralement.  Je me suis finalement intéressée aux métiers de l’accueil et j’ai mis toutes les chances de mon côté pour être prise en bac pro dans ce domaine. Durant mon dernier trimestre de troisième, j’ai fait en sorte de tirer mon épingle du jeu. En fait, dès que j’ai trouvé ma voie, je me suis révélée.

« Poursuivre mes études »

En bac pro, j’ai eu l’impression que, dès le premier jour, on se connaissait tous ! On s’est interrogé sur nos choix, nos ambitions, on a parlé de nos années collège, bref on a très vite eu l’impression d’être une petite famille. Il n’y avait pas du tout cet esprit de compétition que j’avais pu connaître dans le passé. Ici, personne ne se juge, l’émulation est collective et constructive. Et contrairement à ce que certains peuvent penser : je vais pouvoir poursuivre mes études et gagner ma vie en passant par la voie professionnelle ! En ce moment, je termine un stage dans une résidence médicalisée. Je fais de l’accueil physique, je m’occupe du courrier, mais je suis aussi au contact des personnes âgées lors des temps d’animation par exemple. J’ai toujours voulu travailler avec ce public. En seconde et première, j’ai fait plusieurs stages devant des clients à La Poste, dans des hôtels, mais ce que je préfère, ce sont les usagers. A terme, j’aimerais devenir secrétaire médicale ou éducatrice spécialisée. C’est pourquoi j’envisage de poursuivre mes études en BTS Services et prestations des secteurs sanitaire et social ou en licence pro. »

« Les innovations pédagogiques déployées en lycée professionnel sont précieuses »

Emilie Marchès-Ouzitane, mère de Naoual, en bac pro Métiers de l’accueil. Vice-présidente départementale de la FCPE 33.

« Jusqu’au collège, Naoual était en difficulté scolaire, en grande fragilité, c’était poussif. Le manque de motivation, d’estime de soi, d’autonomie faisaient qu’elle subissait l’école.

Sa seconde professionnelle a été marquée par la crise sanitaire et le premier confinement, mais j’ai très vite été admirative de l’innovation pédagogique déployée par les équipes enseignantes pour raccrocher les jeunes. J’ai une autre fille dans l’enseignement général, et je dois dire que la différence était très nette, et elle l’est encore aujourd’hui ! En distanciel, c’était la proposition répétée de visio, l’utilisation de WhatsApp pour fédérer et maintenir le lien, mais chaque jour de l’année, ce sont des astuces pour s’organiser, des conseils pour donner envie, des outils attractifs pour appliquer les savoirs et les connaissances. Il y a beaucoup de travail de groupe, d’entraide, de solidarité. Je suis épatée par cette innovation pédagogique qui capte le lycéen et transmet savoir-être et savoir-faire. C’est précieux pour l’acquisition de l’autonomie. Les élèves ne s’en rendent peut-être pas compte directement mais en travaillant en mode projet, ils sont mis en responsabilités très tôt.

« Les relations sont déjà très professionnelles »

La co-intervention, dans l’établissement de Naoual, est relativement bien menée et permet aux élèves d’étudier les mathématiques selon leur environnement professionnel futur. Les calculs commerciaux intéressent ma fille, qui ne voulait pas entendre parler de géométrie ou d’algèbre. Il y a aussi un rapport élève-enseignant rythmé de confiance, la relation est déjà très professionnelle. Les professeurs les rendent adultes très vite et ne les infantilisent pas. Certains gamins ont des vies écorchées et la voie professionnelle ouvre le champ des possibles. »

« Dans la filière professionnelle, les stages sont déterminants »

Laurent Terrier, père de Thibault, 18 ans, en BTS Bâtiment, et de Mattéo, 15 ans, en bac pro Technicien-menuisier-agenceur. Trésorier départemental de la FCPE 45.

« Mes deux fils ont choisi de s’orienter vers une troisième « prépa-métiers » après leur quatrième. Au lycée Gaudier-Brzeska de Saint-Jean-de-Braye (Loiret), ils ont découvert les professions du bâtiment, via des stages et des enseignements techniques, tout en suivant un programme de matières générales. Thibault a fait son premier stage dans une entreprise de maçonnerie et ça a été le déclic. Il a rejoint dans la foulée un bac pro Technicien du bâtiment. Il a adoré ses trois années durant lesquelles il a pu mûrir son projet, devenir chef de chantier, et multiplier les stages, accompagné par des professionnels disponibles et à l’écoute. Aujourd’hui il est en BTS car il aimerait décrocher un poste à responsabilités. Avec un bac + 2 -voire un bac + 3, il envisage aussi une licence- il espère progresser plus rapidement. Mais il doit s’accrocher et beaucoup travailler.

« Des jeunes plus aguerris »

Mon deuxième fils, Mattéo, a choisi sa voie par défaut. A cause de la crise sanitaire, ses stages de troisième ont été annulés ou reportés. Il a finalement choisi la filière Technicien-menuisier-agenceur mais il ne s’y retrouve pas. Preuve en est, il pense aujourd’hui à bifurquer en boulangerie.

Je suis responsable technique chez Enedis, et je constate chaque jour que les jeunes passés par la voie professionnelle sont plus opérationnels sur le terrain, plus aguerris, nous avons moins de difficultés à leur transmettre des informations, des méthodes, des process de travail. Mes enfants ont choisi cette voie et je les ai accompagnés au mieux pour qu’ils réussissent. Je constate aussi via leurs parcours que les stages sont déterminants et qu’ils peuvent faire à eux seuls mûrir un projet ou le faire flancher… »