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Pouvez-vous définir ce qu’est la cohérence cardiaque ?

Dans les écoles, nous ne parlons pas de cohérence cardiaque, mais de respiration guidée. C’est la même pratique, seulement pour des élèves, c’est beaucoup plus simple d’aborder cela sur ce qu’ils vont vraiment éprouver et pratiquer, c’est-à-dire une pratique respiratoire. La cohérence cardiaque est un terme plus médical qui peut générer un certain nombre de questions, aussi bien chez les élèves que chez leurs parents.

La pratique de la respiration guidée consiste en un exercice respiratoire basé sur une respiration ample, régulière et en un temps donné. On va inspirer sur 5 secondes, et expirer sur 5 secondes, afin de faire 6 cycles respiratoire par minute. Avec les élèves, nous faisons cela pendant 3 minutes. La cohérence cardiaque c’est donc la pratique d’une respiration volontaire, ample, régulière et sur un temps donné.

Pourquoi la mettre en pratique en milieu scolaire ?

L’origine du projet est double. Nous avons eu la chance d’échanger sur cette pratique avec le docteur David O’Hare, qui est un spécialiste de cette discipline, et qui dans le cadre d’une formation, nous expliquait que cela pouvait être un outil très intéressant dans la gestion du stress et des émotions. À partir de cela, nous avons élaboré sur la circonscription de Poitiers – Sud Vienne, avec le soutien du Cardie (cellule académique recherche et développement pour l’innovation et l’expérimentation), et de l’Éducation nationale, un projet de recherche pour mesurer de façon scientifique l’impact de ces pratiques.

Ce qui nous intéressait, c’était de travailler sur deux axes parallèles, mais étroitement imbriqués. À la fois pour les enseignants, en travaillant sur le bien-être professionnel et la gestion du stress lié au métier. Et à la fois sur un dispositif à destination des élèves. Il était extrêmement important pour nous de travailler sur ces deux aspects pour répondre aux problématiques que l’on voit dans les médias et dans les enquêtes internationales sur le stress des élèves français, de leurs difficultés à surmonter leurs difficultés, de leur manque de confiance en eux. L’idée est vraiment d’agir de façon concomitante sur les deux aspects. Nous proposons donc une activité qui leur permet de faire quelque chose ensemble, puisque les élèves respirent avec leur enseignant. C’est un temps qui permet à l’ensemble du groupe classe d’être à l’unisson.

À quel moment pratiquer ces temps de respiration guidée ?

Dans le protocole expérimental que nous avons mis en place l’année dernière, nous le proposons sur trois temps.

Le premier temps est le matin, après les activités de rituel et avant la première tâche cognitive des élèves. C’est-à-dire avant la première mise en situation de travail, une situation qui nécessite concentration, engagement, réflexion, et apprentissage. C’est un temps de sas si vous voulez, qui permet de mettre à distance tout ce que les élèves peuvent malheureusement ramener à l’école, pour se poser et pouvoir être concentré sur les consignes.

Le deuxième temps proposé, est au retour de la récréation du matin, puisqu’il s’agit également d’un temps où l’on sort de la posture d’élève, pour redevenir enfant. Il y a aussi sur ces retours de récréation parfois, une difficulté de certains élèves à retrouver ce qu’on attend d’eux en classe.

Et, de la même manière, nous le proposons au retour de la pause méridienne, puisque c’est un temps qui génère aussi beaucoup de tension et d’excitation chez les élèves.

Nous avons pu aménager ces temps en fonction des classes, des niveaux, et des établissements. Certains établissements ont ajouté une séance au retour de la récréation de l’après-midi. Ils en voient un tel bénéfice le matin qu’ils ont souhaité la mettre en place également l’après-midi. Dans les maternelles, la séance de respiration de l’après-midi a souvent été décalée au moment de l’endormissement pour la sieste. Les personnels qui accompagnent l’endormissement des tout-petits déclarent que c’est vraiment un outil très utile.

Quelle mise en place est nécessaire pour cette respiration ?

L’avantage de la respiration guidée est d’abord que c’est une pratique physiologique. Il n’y a donc aucune interrogation possible avec la spiritualité qui peut inquiéter certaines familles, ou certains enseignants. Au niveau des outils, nous les avons tous, puisqu’on travaille sur sa propre respiration. Nous pouvons donc tous le faire, très facilement.

Mais pour apprendre à respirer de cette façon-là, puisqu’il s’agit rappelons-le d’une respiration particulière, nous proposons aux enseignants et aux élèves quelques ressources. Certaines sont gratuites, il suffit d’aller en ligne se connecter sur la respirothèque, afin de trouver des applications multimédias, et suivre l’outil qui guide la respiration.

Dans son dernier ouvrage, David O’Hare, qui nous accompagne dans ce projet, a proposé des respiroutines qui ont toutes déjà été testées dans des classes. C’est tout un panel de ressources qui permet de varier les manières dont on présente cette activité. Cela permet à la fois de continuer à susciter l’intérêt des élèves, mais aussi que chacun s’approprie le média ou la forme qui lui convient le mieux pour en faire un outil individuel, personnel. Puisque l’objectif est que non seulement cela les aide à l’école, mais avant tout que cela devienne un parcours d’éducation à la santé. Les élèves sont d’ailleurs nombreux à pratiquer ces exercices en dehors de la classe.

Quels bénéfices en tirent les enseignants et les élèves ?

Dans les indicateurs mis en place, nous avons mesuré plusieurs points qui nous paraissaient particulièrement intéressants. Du côté des enseignants, ils nous disent se sentir plus apaisés, plus à l’écoute et disponibles parce qu’ils sont moins sollicités dans la gestion de classe. C’est-à-dire rappeler les élèves à leur métier d’élève, à leur comportement scolaire, répéter les consignes et en conséquence, ils sont beaucoup plus disponibles pour ceux qui en ont le plus besoin.

Du point de vue des élèves, ils disent que cela leur permet de se sentir plus concentrés. Nous avons également pu voir une amélioration en termes de relationnel entre élèves. Ils s’entraident davantage. Ils osent plus poser des questions quand ils n’ont pas compris. Nous avons pu mesurer grâce aux outils dispensés dans le protocole, que les élèves ont une meilleure estime d’eux-mêmes. Et cela va jusqu’à une meilleure projection dans le parcours scolaire.