Mère de trois enfants atteints de TDAH, Myriam Molinier est également l’une des responsables de l’association « TDAH Partout Pareil ». Elle livre son combat quotidien pour ses enfants Justine, 15 ans, en classe de seconde, Julie, 12 ans en 4ème et Louis, 10 ans, en classe de CM2.

Comment avez-vous su que vos enfants étaient atteints de TDAH ?

Tout est parti de mon fils, Louis, qui a aujourd’hui 10 ans. Quand il était petit, il ne tenait pas en place. Son comportement interpellait. Tout s’est compliqué à son entrée en maternelle. En moyenne section, il avait une enseignante qui avait eu ma fille l’année précédente, et avec qui tout s’était bien passé. Pourtant avec mon fils cela n’allait absolument pas. Un jour elle m’a clairement dit « écoutez madame je pense que votre fils a un problème, ou alors c’est vous, et c’est votre fils qui l’exprime à votre place ». Je me doutais que mon fils avait un petit quelque chose, et je me suis donc décidée à consulter une psychologue.

Avant ce rendez-vous, j’ai fait des recherches sur internet, et je cherchais « pourquoi mon enfant est-il si difficile ? ». Je suis alors tombée sur une vidéo du docteur Olivier Revol intitulée  « mon enfant est-il normal ? ». Dans celle-ci, il explique les particularités des enfants à haut potentiel. Là, j’y ai reconnu mon fils. À partir de ce moment, j’ai parlé de ses difficultés à notre pédiatre qui m’a confirmé que cela pouvait être de la précocité. Il a effectivement un haut potentiel, mais on n’a pas su pointer le TDAH. C’est en suivant beaucoup de conférences d’Olivier Revol et en interrogeant d’autres thérapeutes, que j’ai compris que mon fils en avait un. Tout a été confirmé quand il a eu 6 ans et depuis il est sous traitement car c’est un TDAH sévère. Ma deuxième fille, Julie, a été diagnostiquée en même temps que son frère. Un TDAH ne se traduit pas forcément pas de l’hyperactivité. Il peut y avoir juste le déficit d’attention, et ces enfants-là sont plus difficiles à diagnostiquer, et c’est le cas pour mes filles. Quand il y a une grande impulsivité et une grande hyperactivité, on n’a pas de doute.

De quels types de troubles précis souffrent vos enfants ?

Mon fils est dyslexique, dysorthographique, dysgraphique, précoce et TDAH, il cumule donc beaucoup de problèmes pour l’école. Ma fille Julie n’a aucun dys, elle est précoce et TDAH. C’est assez paradoxal, car c’est une enfant qui a de grandes capacités, qui apprend et comprend très vite, mais qui est maladroite et étourdie. Harcelée au collège, elle souffre d’une phobie scolaire. Mon aînée, Justine, avait un retard de langage, elle est aussi dyslexique et dysorthographique. Toutes leurs singularités prouvent que les troubles sont différents d’un enfant à l’autre.

Comment les aidez-vous au quotidien ?

La première des choses à faire est de comprendre ce qu’est un TDAH et comment fonctionne l’enfant atteint. On prend un sacré recul en tant que parent, parce qu’on a reçu beaucoup de remarques négatives sur nos enfants, notre mode d’éducation, notre façon d’être parent, et on s’interroge sur ce qu’on a pu rater ou mal faire. Une fois qu’on a vraiment le diagnostic, qu’on sait que c’est un trouble neurobiologique et neurodéveloppemental, on déculpabilise et il faut alors comprendre comment fonctionnent nos enfants et se renseigner. Ensuite, il faut s’adapter à l’enfant. On ne peut pas avoir une éducation classique. Par exemple, pour Louis qui a énormément de mal à tenir une journée d’école, lorsqu’arrive le moment des devoirs j’essaye, et si cela ne marche pas, je ne le force pas. Parfois, ce n’est pas possible pour lui d’en faire plus. C’est un handicap invisible et très présent, et il faut vraiment faire avec.

Je les écoute aussi beaucoup parce que ce sont des enfants atteints de difficultés sociales. Pour mes trois enfants, je suis attentive à leur anxiété, à leurs angoisses, à leur stress, et je leur apprends à gérer cela pour que tout se passe au mieux.

Un point important aussi bien chez l’enfant hyper précoce que chez l’enfant TDAH c’est que ce sont des personnes hypersensibles. Mon fils qui est précoce, TDAH et atteint de trois dys gère mal la frustration et refuse l’échec. Du coup à l’école cela provoque de nombreuses situations conflictuelles, surtout quand il refuse de faire un exercice qu’il juge trop dur pour lui, même s’il bénéficie d’une AVS. Lorsqu’il ressent un blocage, c’est peine perdue.

En tant que parent, où trouvez-vous du soutien et des conseils ?

À travers mes recherches personnelles et toute la documentation que j’ai lue. Il y a aussi beaucoup d’échanges grâce au réseau TDAH sur Facebook entre parents qui vivent exactement la même chose. Le réseau dys de mon département m’oriente vers les spécialistes quand cela est nécessaire. En tant que parent d’enfants TDAH, j’assiste à beaucoup d’évènements comme des colloques, des conférences. Notre association « TDAH Partout Pareil » travaille aussi sur les questions d’écoute et de soutien. Nous animons un groupe sur Facebook qui compte 16 500 membres et c’est là que nous trouvons de l’entraide, par nos propres expériences, et d’autres témoignages de parents. On s’entoure des spécialistes qui peuvent nous aider en transmettant leurs conseils, et beaucoup de parents qui ont plus d’expériences partagent aussi leurs conseils.

Nos colloques s’articulent autour de différents thèmes liés au TDAH et aux troubles associés. Il y a deux ateliers à destination des parents, un autre à destination des enseignants

Avez-vous des contacts avec des enseignants ou l’éducation nationale ?

Oui, en mars dernier, nous avons rencontré une délégation du ministère de l’éducation nationale. Au préalable, nous leur avons envoyé un rapport expliquant les difficultés des familles et adultes TDAH sur tous les plans (sociaux, scolaires, professionnels) qu’ils avaient apprécié et nous avons pu échanger avec eux à ce sujet. Ils nous ont encouragé à poursuivre nos actions. Ils sont très conscients des difficultés que l’on peut vivre au quotidien, et ont des projets comme la formation des enseignants. L’association « TDAH Partout Pareil » souhaite obtenir l’agrément de l’éducation nationale pour intervenir sans barrières dans les écoles dès la rentrée 2019. C’est un énorme travail parce qu’il faut contacter les académies pour pouvoir former les enseignants. C’est un vœu du ministère qui s’y prépare aussi et je pense qu’à la rentrée prochaine on nous annoncera certaines choses à mettre en place.

Pour les enseignants, nous avons un autre groupe Facebook dédié aux membres de l’éducation (enseignants, professeurs, éducateurs, AVS…). Du coup, quand ils veulent se renseigner ou poser leurs questions, ils obtiennent des réponses claires et sans aucun jugement. On a de plus en plus de contacts avec eux et on leur fournit des fiches que l’on a créées spécialement à leur intention. Il reste encore beaucoup à faire, mais le rôle de notre association est d’être l’intermédiaire entre toutes les personnes qui ont besoin de connaître le TDAH pour mieux vivre avec.