
Héloïse Dufour, présidente d’Inversons la Classe, veut mettre la classe inversée dans la « malette pédagogique de chaque enseignant ».
La classe inversée est-elle mieux connue qu’à ses débuts en France, il y a 4 ou 5 ans ?
Le terme est connu et fait partie du paysage pédagogique. Il existe aujourd’hui une vraie communauté d’enseignants, qui partage assidûment ses pratiques, sur Twitter et lors de nos événements. Le succès du CLIC, qui devrait réunir cette année entre 500 et 600 participants, en témoigne.
En revanche, les pratiques que recouvre le terme “classe inversée” n’est pas encore assez connu. On a l’impression que pour beaucoup, la classe inversée reste cette caricature du cours à la maison et des devoirs en classe… Alors que dès le premier Congrès, il était clair pour ceux qui la pratiquaient, que la classe inversée était quelque chose de beaucoup plus vaste – avec une diversité de pratiques (utilisation des capsules comme une mise en bouche, conception du cours par les élèves, tâches complexes, plans de travail différenciés, travaux de groupes…) et l’idée centrale de repenser la posture de l’enseignant et celle de l’élève dans l’apprentissage.
Dès 2015, il y avait des questionnements larges sur l’évaluation, des pratiques de travail en groupe, et l’on sortait de la réduction de la classe inversée à des questionnaires, des vidéos et des activités en classe. Les enseignants suivent souvent le même cheminement : ils entrent dans des pratiques de classe inversée relativement simples, avant de transformer toute leur séquence pédagogique quelques années plus tard, vers des pratiques plus élaborées.
Le troisième CLIC s’intitule “changer de posture”…
Il s’agit d’un changement de posture de l’enseignant, qui va être davantage dans le côte-à-côte vis-à-vis des élèves que dans le face à face, et qui va les accompagner. Son rôle n’est pas de transmettre le savoir, mais de construire les conditions pour que les élèves s’approprient les connaissances et les compétences.
Du côté des élèves, la classe inversée permet de les rendre acteurs, voire producteurs ou concepteurs de leur propre apprentissage – et pas simplement récepteurs.

Avec la classe inversée, les élèves de David Bouchillon sont « mis en activité »
Une conférence du CLIC 2018 concerne la formation des enseignants à la classe inversée… est-ce nécessaire de nos jours ?
Il y a une réelle demande des enseignants, qui souhaitent se lancer, de conseils sur ce qu’il est possible de mettre en place, comment… Ils peuvent avoir peur face aux pratiques souvent très poussées des profs inverseurs, et ils ont besoin d’être accompagnés, pour une mise en place progressive.
En outre, une vraie formation s’impose face à la vision très caricaturale de la classe inversée, encore trop véhiculée, afin de bien faire comprendre aux enseignants qu’il ne s’agit ni d’un protocole, ni d’une recette à suivre à la lettre, mais d’un ensemble de pratiques réflexives – d’une réflexion pédagogique plus large, sur comment intégrer des outils pédagogiques pour mieux différencier son apprentissage, et faire en sorte que les élèves apprennent mieux. La capsule n’est que le haut de l’iceberg !
Dans ce sens, le CLIC et la semaine de la classe inversée (CLISE), mais aussi l’existence de collectifs enseignants sur Internet, favorisent les partages entre profs, afin de permettre une horizontalisation des échanges, que l’institution a encore du mal à faire.
Si le plus important n’est pas ce qui est vu à la maison, mais ce qui se passe en classe… en quoi la classe inversée est-elle différente des pratiques de pédagogie active de l’éducation nouvelle, du début du XXe siècle ?

La classe inversée d’Olivier Quinet
Les principes de cette méthode d’enseignement sont effectivement très anciens. La collaboration, les activités… tout ceci remonte au début du XXe, avec l’éducation nouvelle, mouvement reposant sur la pédagogie active. On y retrouve des méthodes telles que la pédagogie Freinet ou l’éducation progressive. C’est la raison pour laquelle, pour le CLIC 2018, nous avons invité des praticiens Freinet et des pédagogies institutionnelles à intervenir.
Le terme “classe inversée” est neuf, mais pas un certain nombre de pratiques. Ce n’est pas pour autant la raison pour laquelle il faudrait croire que tout est vieux dans la “flipped classroom” : ce qui caractérise aujourd’hui son développement, c’est l’utilisation massive du numérique, qui facilite énormément la mise en place des pratiques de pédagogie active.
La classe inversée représente une marche d’entrée vers celles-ci. J’aime beaucoup ce que me disais récemment un enseignant : “avant je regardais les pédagogies actives comme des cartes postales de Tahiti, c’était très beau, on avait très envie d’y aller, mais on n’avait pas les moyens… Alors qu’en classe inversée, on peut commencer petit, avant de faire évoluer l’ensemble de ses pratiques”.
Comment, en tant que défenseurs de la classe inversée, êtes-vous perçus aujourd’hui par l’Éducation nationale ?
L’Education nationale n’est pas monolithique – de nombreux représentants de l’institution, sur le terrain, perçoivent encore la classe inversée comme un protocole à suivre, avec des cours à la maison et des activités en cours. Nous avons beaucoup travaillé pour lui faire comprendre que notre but n’est absolument pas d’imposer la classe inversée comme unique moyen d’enseignement, mais de mettre à disposition des professeurs des outils pour leur permettre de mettre en place leurs propres classes inversées, s’ils le souhaitent. Nous sommes soutenus, depuis 2016 par le ministère, et il nous reste encore un gros travail à faire pour que localement, ce message soit porté.
[warning]Le CLIC 2018 aura lieu à Paris (Université Paris Descartes) du 29 juin au 1er juillet. Vous pouvez retrouver le programme complet sur le site de l’événement.[/warning]
Effectivement la classe inversée s’avère comme étant une alternative pour élèves et enseignants.
Les différents témoignages et les expériences menées sur twetter sont porteuses et prometteuses .
Si un expert en la matière peut nous dire ce qu’il en est pour la production de l’écrit et pour le projet de révision et réécriture .