enseignant primaire

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Le 26 avril dernier, Jean-Michel Blanquer a publié quatre circulaires et a diffusé un guide de recommandations auprès des professeurs des écoles, baptisé « pour enseigner la lecture et l’écriture au CP« . S’appuyant sur « l’état de la recherche », ce document de 130 pages préconise notamment l’utilisation de la méthode de lecture dite « syllabique » comme seule méthode valable.

Les syndicats d’enseignants SNUipp-FSU et Sgen-CFDT s’opposent frontalement à ce guide et aux circulaires du ministre de l’Éducation nationale. « On n’enseigne pas comme on monte un meuble ! », lance le SNUIPP dans un communiqué. Et de dénoncer le « caractère injonctif et partial » du guide à destination des enseignants de CP : « l’acte d’enseigner ne peut se résumer à des recettes simplistes, et on ne lutte pas contre l’échec scolaire en publiant des bréviaires. »

Selon le SNUIPP, c’est la liberté pédagogique des profs qui est ainsi mise à mal : « le ministre de l’éducation enterre le concept d’école de la confiance dont il prétendait s’inspirer depuis la rentrée. C’est bien une mise au pas des enseignants à laquelle il se livre avec des injonctions visent à encadrer de façon directive les pratiques et les méthodes choisies par les enseignants, en niant totalement leur professionnalité, leur réflexion sur leur métier, leur engagement et les actions qu’ils mènent chaque jour dans leur classe auprès de leurs élèves. »

Des circulaires « injonctives » et « insultantes » (SGEN)

« Peut-on concilier confiance et circulaires injonctives ? », s’interroge de son côté le SGEN. Pour le syndicat, les circulaires (qui font référence aux pratiques pédagogiques des professeurs des écoles en français et en mathématiques) parues au BO sont une « insulte au professionnalisme et à la liberté pédagogique » des enseignants. Sur son site, l’organisation écrit que face à des élèves en difficulté et à  « l’incapacité de notre système à réduire les inégalités », les nouvelles circulaires, qualifiées « d’injonctives » sont inutiles et « ne permettront pas non plus de redonner confiance en l’école ».

« Que ce soit le rapport du Cnesco ou le rapport Villani-Torossian sur lesquels s’appuient ces circulaires, l’interprétation qui en est faite est une déclinaison réductrice des programmes par cycle et du socle commun. Elle ne tient pas compte des situations particulières rencontrées dans chaque classe », indique en outre le SGEN.

école primaire rythmes scolaires

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« Une opération de communication » (SNUIPP)

Tandis que le SNUIPP dénonce des « injonctions contradictoires avec les programmes » et des « prescriptions rétrogrades », avec une référence « quasi-exclusive aux neurosciences » qui renvoie selon lui à « l’ancien monde, où existait une pensée officielle », le SGEN s’attaque à la circulaire mathématiques, qui incite les enseignants à renforcer l’apprentissage du calcul et des situations-problèmes.  » Il est par exemple inconcevable de réduire l’enseignement mathématiques à des consignes comme ‘le calcul mental doit faire l’objet d’une pratique quotidienne moyenne d’au moins quinze minutes' », écrit le syndicat.

En ce qui concerne les circulaires sur l’apprentissage de la langue et le guide CP, le SGEN qualifie ces documents de « réducteurs », en préconisant des « pratiques ayant fait la preuve de leur inefficacité » (comme l’assignation à chaque séance d’un objectif d’apprentissage précis, ou une dictée quotidienne), plutôt que « ‘l’acquisition progressive et continue, dans la logique du Socle commun, des connaissances et des compétences par l’élève ». Et de critiquer la « remise en cause de la capacité des enseignants à mettre en place des pédagogies adaptées à chaque élève ».

Finalement, pour le SNUIPP, les 4 circulaires et le guide publiés par Jean-Michel Blanquer ne seraient qu’une « opération de communication destinée à l’opinion publique », qui négligerait « les vrais leviers pour améliorer l’école », que sont « l’indispensable formation des enseignants et l’amélioration des conditions d’apprentissage des élèves ». Le syndicat conclut que « faire peser la responsabilité sur les enseignants et leurs méthodes permet au ministre de ne pas aborder la question budgétaire et celle d’une école primaire sous-investie qui ne sera pas la priorité du gouvernement ».

Le syndicat des enseignants du primaire appelle ces derniers à « continuer d’inscrire leurs pratiques dans le cadre institutionnel prévu par la loi, c’est-à-dire appliquer les programmes en faisant usage de leur liberté pédagogique et en s’appuyant sur les travaux de toute la recherche. »