« Lorsque je suis arrivé pour donner mon cours à 9h ce matin, une feuille de papier sur la porte indiquait que le bâtiment était fermé jusqu’à lundi », raconte un enseignant de la Sorbonne.

Le fourgon présent sur la place lui avait mis la puce à l’oreille, mais c’est en consultant rapidement ses mails sur son téléphone qu’il comprend qu’il n’allait pas pouvoir donner de cours aujourd’hui. « La direction de l’université évoque “des événements” ayant conduit à la fermeture de l’université sans nommer clairement les choses, à la limite, j’aurais préféré un vrai blocage plutôt qu’une fermeture décidée par l’administration », s’amuse l’enseignant.

Un rassemblement qui rappelle à certains, comme Christian Delporte, professeur d’histoire contemporaine, à l’Université de Versailles Saint- Quentin-en-Yvelines, le 3 mai 1968. Ce jour-là, la première émeute dite « de mai 1968 » s’était déclenchée à la suite de l’intervention de la police dans la cour de la prestigieuse université parisienne; en plein cœur du Quartier Latin.

Une assemblée générale qui tourne à l’occupation

Si on ne peut pas encore parler d’émeute, la fermeture de l’université est bien due à l’action des étudiants. Jeudi, une Assemblée Générale rassemblant toutes les universités parisiennes devait avoir lieu au sein des locaux de l’université Paris IV. Plusieurs centaines de personnes se réunissent donc dans les locaux de l’université en attendant que d’autres les rejoignent. « J’ai voulu me rendre à l’AG mais quand je suis arrivée, des CRS bloquaient l’entrée », raconte une étudiante présente sur les lieux au moment des faits.

En guise de protestation, ceux qui étaient à l’intérieur ont finalement voté l’occupation du bâtiment jusqu’à ce que l’AG prévue au départ puisse se tenir. Finalement, ils ont été expulsés de force par la police et la manifestation qui grossissait à l’entrée du bâtiment a elle aussi été dispersée.

Les étudiants qui occpuent la Sorbonne communiquent avec ceux bloqués par la police à l'extérieur du bâtiment/ Crédit : D.R

Les étudiants qui occupent la Sorbonne communiquent avec ceux bloqués par la police à l’extérieur du bâtiment/ Crédit : D.R

Un mouvement qui prend de l’ampleur

Dès décembre les enseignants-chercheurs se mobilisent contre la loi Orientation et Réussite des Etudiants (ORE), adoptée par l’Assemblée et le Sénat depuis février.

Mais c’est réellement depuis le début du printemps que le mouvement de contestation prend de l’ampleur dans les universités. Les événements de Toulouse-2 Le Mirail, où un président de tutelle a été nommé directement par le ministère de l’Enseignement Supérieur, et de Montpellier-3 Paul Valéry, où des étudiants occupant l’université se sont fait agresser physiquement par des hommes masqués, ont mis le feu au poudre. Un peu partout en France, la contestation s’est finalement intensifiée, prenant la forme d’assemblées générales d’occupation de salles, ou encore de blocage total des universités.

« On a 16 universités qui sont bloquées. Quant aux chiffres de mobilisation dans les AG, on n’avait pas vu ça depuis 2006 et le mouvement contre le CPE« , déclare à BFM TVPauline Raufaste, vice-présidente du syndicat étudiant UNEF, jeudi 12 avril.

L’intensité de cette mobilisation est toutefois nuancée par certains, dont le Président de la République lui-même. Emmanuel Macron a en effet déclaré lors de son passage au 13h de TF1 : « Dans beaucoup d’universités, il n’y a pas que des étudiants mais des agitateurs professionnels. »

De même, François Germinet, vice-président de la Conférence des présidents d’université, a déclaré au Figaro : « Il n’y a pas de mouvement d’ampleur nationale, dans les universités », ajoutant que, selon lui, les étudiants restent « largement acquis à la loi ».