Vous n’avez jamais vu un Agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM), masculin ? Rien d’étonnant, sur les quelque 51 000 personnes qui exercent ce métier, 200 seulement sont des hommes. A l’occasion de la journée des ATSEM, Vincent, Hervé et Christophe ont partagé avec nous leurs anecdotes. Une manière d’aborder une des particularités de ce métier : sa grande féminisation.

Vincent, doyen des ATSEM

Vincent Chevalier, 54 ans, ATSEM

Vincent Chevalier, 54 ans, ATSEM/ Crédit: D.R.

Il ne faut pas s’y tromper, malgré la vieille blouse grise d’enseignant que Vincent porte sur les épaules, ce quinquagénaire n’est pas instituteur mais ATSEM. « La mairie n’a pas trouvé de fournisseur qui propose des blouses adaptées aux hommes », s’amuse-t-il.

Après avoir travaillé en grande surface, ou auprès de jeunes dans le cadre ecclésial, il rejoint l’école maternelle de Louvroil (59), près de la frontière belge. Rapidement, il s’aperçoit que sa vocation surprend.  « En 2001, lorsque j’ai été embauché, la directrice générale des services s’est presque excusée devant moi d’imposer des tâches ménagères à un homme, se rappelle Vincent, du haut de ses 54 ans, pourtant, je n’y voyais aucun inconvénient. Ça fait simplement partie de mon métier. »

En une quinzaine d’année d’exercice, il n’a pas travaillé une seule fois en binôme avec un enseignant masculin, si ce n’est avec des remplaçants. Pas forcément étonnant quand on sait que 70% des enseignants du premier degré sont des femmes. « Lors de mon oral de concours on m’a d’ailleurs demandé si cela me dérangeait de recevoir certaines directives de la part d’une femme. Bien évidemment, j’ai dit non. »

Sa position marginale lui permet également de combattre certains clichés. Un matin, alors qu’il voit deux enfants arriver à l’école accompagnés de leur mère, Vincent passe la tête par la fenêtre : « Pourquoi c’est ton frère qui porte ton gros cartable alors qu’il est plus petit? », interpelle-t-il gentiment. Quelques jours plus tard, la mère vient le trouver : « J’ai compris, à votre remarque de la dernière fois, que vous aviez le souci des enfants, même si vous êtes un homme. Ça m’a rassurée ». « C’est pour vivre des moments comme ceux-là que je fais ce métier, conclut-il. »

Christophe, sept enfants, une vingtaine d’élèves

Christophe Sontag, 44 ans, ATSEM/ Crédit : D.R.

Christophe Sontag, 44 ans, ATSEM/ Crédit : D.R.

Les enfants, Christophe les adore. Pour preuve : chez lui il y en a sept, et sur son lieu de travail, plus d’une vingtaine. A 44 ans, il a passé  20 années de sa vie à leurs côtés, d’abord dix ans en tant qu’animateur, puis dix au poste d’ATSEM, à Vernouillet dans l’Eure-et-Loire.

« Quand j’ai passé le concours, j’étais le seul homme sur 64 candidats. Je devais montrer que j’étais tout aussi capable de m’occuper des enfants que les femmes. » Un besoin de gagner en crédibilité qui ne l’a pas quitté même une fois le concours obtenu. « J’ai fait de nombreuses formations parce que j’avais besoin de convaincre les gens que j’étais compétent. » Christophe a aussi dû rassurer quant aux soupçons de pédophilie qui pèsent plus facilement sur les hommes que sur les femmes. « Dans une de mes anciennes écoles, nous avons été jusqu’à organiser une réunion avec les parents pour que j’explique que s’occuper de leurs enfants était simplement mon métier. »

La question du ménage en classe s’est également posée à lui. « Des enfants m’ont déjà demandé pourquoi c’était moi, qui suis un homme, qui m’occupais de nettoyer les tables après les ateliers et non pas la maîtresse, qui est une femme. » Des remarques qui, selon Christophe, viennent d’enfants qui ont des familles où les tâches ménagères sont exclusivement assumées par des femmes. « Ces remarques me permettent d’ouvrir le débat et cela porte ses fruits : les petits garçons s’intéressent davantage au nettoyage et viennent m’aider. »

Hervé, animateur et ATSEM à la fois

Hervé, 32 ans, ATSEM/ Crédit : D.R.

Hervé, 32 ans, ATSEM/ Crédit : D.R.

Comme Christophe, Hervé, 32 ans, est passé par l’animation, il pratique d’ailleurs les deux professions en même temps. « Grâce à mon CAP petite enfance, j’effectue des remplacements dans différentes écoles. » Cet habitant de Cournon, dans le Puy-de-Dôme, tourne sur quatre écoles maternelles et peut se retrouver ATSEM le matin et animateur l’après-midi. « Je ne mélange pas les deux métiers qui sont différents, quand je suis dans une classe je priorise l’acquisition de connaissances aux loisirs. »

Pour lui, le métier d’ATSEM n’a rien de spécifiquement féminin. « C’est un métier que l’on doit sentir, il faut aimer les enfants, les voir grandir, être avec eux. La maternelle est un moment extrêmement important dans la vie d’un enfant, c’est là que tout commence. » Il a pourtant pu sentir quelquefois la différence entre lui et une ATSEM femme. « Certains parents sont déjà venus me voir en classe, pensant que je suis enseignant. Pour eux, un homme ATSEM ça n’existait pas. »

Lorsqu’il parle des désavantages de sa profession, Hervé évoque les classes surchargées et le manque d’effectif qui « ne permettent pas de s’occuper pleinement de tous les élèves. » Cela ne gâche pas pour autant le plaisir qu’il a à exercer son métier : « je n’ai pas à me plaindre, les enseignants et les autres ATSEM sont tous contents de me compter dans leur équipe. »