
Serge Lacassie
Le texte officiel de réforme du baccalauréat vient de sortir. Comment accueillez-vous les nouvelles propositions concernant les SVT ?
Nous sommes déçus ! Lorsque nous avions été reçus au mois de novembre par la commission Mathiot, il était convenu que les SVT auraient, elles aussi, une place dans le tronc commun. Or, on s’aperçoit qu’elles deviennent, à partir de la première, un enseignement de spécialité (4h par semaine en première et 6h en terminale) au même titre que la physique-chimie. Alors que la France a besoin de scientifiques, faire des SVT une discipline non obligatoire est un grave recul de notre enseignement. Toutefois, on note l’apparition d’une nouvelle discipline appelée « humanités scientifiques et numériques. » C’est une bonne nouvelle mais les contours de cet enseignement restent encore flous. Le ministre a simplement indiqué qu’il pourrait notamment s’agir de « sciences, de philosophie et d’histoire-géographie » et serait dispensé par des enseignants de plusieurs disciplines. Nous sommes actuellement en attente de plus amples précisions sur cette nouvelle discipline, les SVT et le projet de réforme dans sa globalité. Enfin, nous regrettons la suppression du baccalauréat scientifique actuel. Nous avions un choix globalement équilibré des disciplines scientifiques (maths, physique-chimie et SVT). Aujourd’hui, il est complétement remis en cause.
Un élève ne choisissant pas la spécialité SVT n’étudiera donc plus cette discipline après la seconde…
Tout à fait. S’il décide de ne pas opter pour cette spécialité, l’élève n’étudiera plus les SVT dès la fin de la seconde. C’est très regrettable quand nous savons que cet enseignement est essentiel aux élèves pour comprendre le monde dans lequel ils vivent. Ce projet de réforme ne touche pas seulement les SVT, la physique-chimie ou les mathématiques, comme bien d’autres disciplines, subissent le même sort ! Il y a quelques mois, nous avions aussi fait la demande d’avoir des couplages SVT/disciplines non scientifiques telles que l’histoire-géo ou la philosophie. Dans le rapport Mathiot, ces combinaisons ont été mentionnées mais n’ont pas été retenues dans le texte officiel du ministre…
Pourquoi les SVT apparaissent comme indispensables pour les élèves ?

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Nous abordons divers sujets incontournables et ancrés dans le quotidien : les enjeux de la vaccination et de la contraception, les problèmes alimentaire et de santé, la sexualité, l’environnement, le réchauffement climatique, etc. Même si ces thématiques ne sont pas poussées à un niveau scientifique très élevé, elles permettent à tous les élèves, futurs citoyens, de comprendre les enjeux actuels et d’acquérir une culture scientifique de base. Ces notions sont ainsi nécessaires s’ils souhaitent argumenter, critiquer ou se faire un avis.
L’APBG a-t-elle mené des actions pour signaler son mécontentement ?
Avant la publication du texte officiel de réforme, une pétition, notamment pour élargir les choix de combinaisons de majeures (mentionnées dans le rapport Mathiot), a circulé sur les réseaux sociaux. Adressée à Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et à Pierre Mathiot, rapporteur de la commission sur la réforme du lycée, elle avait pour objectif de faire revenir la commission sur ses propositions en demandant la création d’une combinaison associant SVT et mathématiques. A l’heure actuelle, la pétition a recueilli plus de 52.000 signatures. Une lettre ouverte, dénonçant la réforme du lycée, a également été publiée dans Libération. Par ailleurs, l’APBG est actuellement en train de faire circuler une autre pétition plus générale sur la réforme du lycée. Elle dénonce la façon dont s’est déroulée la concertation et la rapidité avec laquelle le ministre a pris sa décision. Cette pétition est signée par pratiquement toutes les associations d’enseignants spécialistes. Enfin, des rencontres des instances nationales de notre association, avec la commission et des responsables du ministère, ont eu lieu et devraient se poursuivre.
Avec cette réforme, il est fort probable que de nombreux élèves arrêteront les mathématiques et les sciences en fin de seconde. Ils seront encore plus nombreux à ne plus suivre de SVT et/ou de Physique-Chimie.
Il y aura des répercussions en amont dans ces 3 disciplines qui deviennent donc de simples options aux lycée.
1) En seconde les élèves qui auront déjà en tête de ne plus suivre ces enseignements, ne suivront plus, n’écouteront plus et gêneront le bon déroulement des cours…
2) Au collège, les mathématiques seront vu comme une matière secondaire du lycée, il est fort à parier que les élèves réduiront leurs efforts. D’autant plus qu’ils n’auront plus comme espoir de pouvoir un jour entrer en première S et faire un bac S. Cette contamination finira par toucher le primaire.
3) En primaire, les nouveaux enseignants auront pour la plupart arrêté les maths et les sciences en fin de seconde…
4) Plus personne d’équilibré mentalement ne souhaitera venir enseigner dans ces disciplines, ils sont déjà peu nombreux aujourd’hui, donc demain… Comment être motivé pour venir enseigner une matière optionnelle donc peu importante voire inutile visiblement aux yeux de notre ministère.
Ceci n’est il pas vrai pour n’importe quelle matière qui n’est pas obligatoire?
De plus l’absence de contrôle continu risque de démotiver beaucoup d’élèves. En effet, la reforme parle de 40% de contrôle continu mais le ministre dit que chaque matière du tronc commun sera évalué 1 fois seulement dans ce cadre, entre la classe de 1ère et le milieu de celle de terminale…ce qui n’a rien de continu!
Une matière évaluée en janvier de l’année de première ne sera plus travaillée (que compte environs 10% de moyenne generale, sois plus ou moins 1,5-2% pour chaque matière ?)