
© Marco Herrndorff – Fotolia
Au Danemark, l’Education nationale veut permettre aux profs de fouiller les ordinateurs et les smartphones des élèves pour empêcher toute fraude lors des examens.
Selon le site Information, la ministre Merete Riisager souhaite ainsi, dans un projet de décret, autoriser les examinateurs à consulter l’historique des sites visités, sur les ordinateurs portables et smartphones personnels. L’activité des jeunes sur leurs comptes Facebook pourrait également être scrutée.
Au Danemark, l’accès à Internet est permis en examen
Pour bien comprendre cette information surprenante, il faut savoir qu’au Danemark, depuis 2011, les lycéens ont le droit d’accéder à Internet pendant les examens qui jalonnent le parcours du Gymnasium (l’équivalent du lycée français), via le BYOD « (Bring your own device – Apporter son propre matériel). Les élèves peuvent ainsi venir avec leur ordinateur portable et leur smartphone – l’accès à Internet étant perçu comme une « ressource académique ».
En contrepartie de cet usage libre d’Internet, les examens ont été adaptés – les exercices sont beaucoup plus complexes, ce qui limite la possibilité de se borner à faire du « copier-coller ».

© Production Perig – Fotolia
« Beaucoup considèrent qu’il est facile de tricher »
Pour éviter la triche, il n’y a qu’une seule limite : les étudiants n’ont pas le droit de communiquer avec l’extérieur. Et à l’issue des examens, des logiciels anti-plagiat sont utilisés.
Mais comme l’explique Le Monde, certains établissements examinent déjà les ordinateurs à la fin des examens, « pour s’assurer que les bacheliers n’ont pas reçu d’aide de l’extérieur ». C’est ce procédé que Merete Riisager veut généraliser.
Selon le ministère danois de l’Education, dans le cas où un étudiant refuserait de laisser l’examinateur inspecter son matériel, l’école aurait le droit de l’empêcher de passer son examen, ou d’apporter son équipement informatique lors d’examens ultérieurs.
Une violation de la vie privée ?
Comme l’explique Information, des établissements utilisent déjà un logiciel, Exam Monitor, qui prend régulièrement des captures d’écran, afin d’éviter toute tricherie. Mais le projet du gouvernement, qui va bien plus loin, inquiète les associations danoises et les organismes de défense des libertés sur Internet.

Julien Lozelli/CC/Flickr
Pour Jens Philip Yazdan, président de l’association des lycéens danois, il s’agirait d’une « intervention disproportionnée, violente et trop envahissante », qui violerait la vie privée des élèves : « il y a beaucoup de choses privées sur un ordinateur auxquelles l’école ne devrait pas pouvoir accéder ».
En outre, comme le remarque Jesper Lund, de l’association « Politique Informatique », ceux qui veulent vraiment tricher « réussiraient facilement à contourner un tel examen du matériel numérique, en utilisant la fonctionnalité ‘navigation privée’ du navigateur web. Et en cas de demande d’aide sur un réseau social, les messages peuvent facilement être supprimés ».
Une mesure contraire aux droits de l’homme ?
Pour le professeur de droit Sten Schaumburg-Müller, interrogé par Information.dk, la mesure souhaitée par Merete Riisager pourrait constituer une violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui stipule que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».
Le projet de décret pourrait également être contraire à la loi danoise sur les données personnelles, selon laquelle il n’est pas permis d’examiner « plus d’informations personnelles que nécessaire pour atteindre un objectif donné ».
Selon Sten Schaumburg-Müller et Jesper Lund, une autre méthode pourrait permettre de lutter bien plus efficacement contre la fraude, tout en préservant la vie privée des candidats : la mise à disposition, par les écoles, d’ordinateurs – sur lesquels il n’y aurait aucun contenu personnel -, à la place du BYOD.
En 2009, le Danemark était plus optimiste : « le Danemark ne serait fondamentalement pas un pays de tricheurs croit savoir [l’initiatrice du projet] Sanne Yde Schmidt : « la principale précaution est que nous leur faisons confiance » explique la responsable ».
http://www.numerama.com/magazine/14435-le-danemark-autorise-l-acces-a-internet-lors-d-examens.html