Elise Veux

Elise Veux

Vous êtes enseignante en ULIS depuis 2 ans. En quoi consiste votre métier ?

Je suis enseignante coordinatrice en ULIS (unité localisée pour l’inclusion scolaire) à l’école de St Seurin sur l’Isle, en Gironde, située en REP. J’accueille 12 élèves entre 6 et 11 ans. L’ensemble de mes missions consiste à mettre en œuvre le Projet Personnalisé de Scolarisation de chaque élève.

Ma mission première est de définir les besoins éducatifs de l’élève. Une fois les besoins identifiés, je suis amenée à mettre en œuvre des apprentissages scolaires qui peuvent aller de la petite section au CM2. Par exemple, un élève peut être très doué en mathématiques mais dispose de lourdes difficultés en lecture. Il suivra donc les cours de mathématiques en classe ordinaire et l’apprentissage de la lecture en ULIS.

Ma deuxième mission est alors celle de coordinatrice. Je dois élaborer l’emploi du temps de chaque élève avec l’enseignante de la classe d’inclusion. C’est une classe « ordinaire » dans laquelle l’élève, rattaché au dispositif ULIS, va avoir une place. Le but est de pouvoir développer des compétences sociales et scolaires en lien avec des élèves du même âge.
Je travaille alors avec chaque enseignant(e) qui va accueillir l’élève. Je fais des propositions concernant les domaines d’inclusion qui me semblent possibles pour l’élève dans la classe ordinaire. J’ai la chance d’être dans un groupe où le travail en équipe est moteur, où les collègues sont sensibles à l’inclusion.

Parallèlement, je dois mettre en œuvre les temps d’apprentissage au sein de l’ULIS en complément des inclusions. Sur ce temps, je dois créer un climat de classe propice aux apprentissages, au respect et à la bienveillance. J’ai à cœur que l’ULIS soit un lieu où les différences soient respectées.

A quel type de handicap avez-vous affaire et comment les élèves se comportent-ils en cours ?

Les élèves que j’accueille en ULIS école ont des handicaps cognitifs (retard en lecture, en calcul…). Ils vont apprendre à vivre ensemble avec leurs différences. Certes, il y a des problèmes de comportement, des agitations, des bavardages… mais les collègues des classes ordinaires vivent exactement la même chose. Ce n’est pas plus accentué en ULIS !

élève primaire

© gpointstudio – Fotolia

Comment se déroulent vos cours et quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontée ?

En ULIS, j’accueille les élèves dès la sonnerie du matin. Certains élèves vont ensuite en inclusion et d’autres participent aux apprentissages de l’ULIS. Nous travaillons beaucoup sous forme d’ateliers ce qui me permet de fonctionner comme des classes à triple ou quadruple niveaux. Grâce à cela, je peux observer attentivement les élèves chaque jour, prendre en charge leurs difficultés, verbaliser leurs progrès et leurs réussites.

La plus grande difficulté tient au fait qu’il faut créer une dynamique de groupe et mettre en œuvre des projets fédérateurs alors même que l’ensemble des élèves du dispositif ULIS n’est pas forcément présent à tous les cours. Tout dépend en effet des besoins éducatifs de chaque élève. Ainsi, entre les cours en ULIS et les cours en classe ordinaire, cela implique une gestion des emplois du temps assez rigoureuse pour l’enseignant(e) d’ULIS.

En quoi votre travail en tant qu’enseignante en ULIS diffère-t-il d’un travail en classe « ordinaire » ?

La différence fondamentale entre la classe ordinaire et l’ULIS est que chaque élève à un Projet Personnalisé de Scolarisation. C’est à partir des besoins de chaque élève que les apprentissages sont mis en œuvre. Le projet de classe est donc élaboré du singulier vers le groupe.
Les élèves d’ULIS ont besoin de reprendre confiance en eux et en leurs capacités à apprendre et à progresser. Pour cela, je mets en œuvre des projets d’apprentissage qui ont du sens pour les élèves, cela renvoie à une pédagogie active et à des projets où les apprentissages seront valorisés le plus possible : expositions en arts plastiques, projets d’écriture publiés sur le blog de l’école, projets artistiques pour lesquels le langage sera central, lectures partagées avec d’autres élèves, fabrication de crêpes pour toute l’école…

Une autre différence réside dans le fait qu’en ULIS, je dois m’appuyer sur les programmes de l’éducation nationale pour faire progresser les élèves mais je peux aussi prendre le temps de les faire avancer à leur rythme. Je définis et j’organise leurs apprentissages en tenant compte avant tout de leur capacité à progresser.
Pédagogiquement, j’ai aussi créé une démarche qui vise à verbaliser les apprentissages pour rendre explicite la langue de l’école, c’est la démarche des cartes d’apprentissages. Elle permet aux élèves en grande difficulté de mieux comprendre les enjeux des apprentissages.

classe de primaire

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Lorsqu’on est enseignante en ULIS, se sent-on encore plus utile ?

Je ne dirai pas forcément plus utile mais nous savons pourquoi on est là ! En choisissant d’être enseignante spécialisée, j’ai choisi de travailler avec des élèves en situation de handicap. Dans la classe ordinaire, il y a parfois des élèves qui peuvent être en situation de handicap ou en grande difficulté scolaire mais les moyens ne sont pas les mêmes (25 élèves par classe, manque de temps…). Ces enseignants se retrouvent démunis, c’est très compliqué à gérer ! Pour ma part, je n’ai pas le sentiment d’être plus utile, c’est juste mon rôle de prendre en charge ces élèves et de les accompagner.

Quelles sont les compétences indispensables à avoir pour exercer ce métier ?

Pour ma part, le fait d’avoir déjà enseigné en classe ordinaire à des élèves de moyenne section jusqu’au CM2 m’a permis d’avoir une véritable connaissance des programmes scolaires. Je peux désormais comparer le niveau de l’élève en ULIS à celui d’un élève en classe ordinaire et ainsi adapter les apprentissages en fonction de ses besoins. Pour exercer ce métier, il faut aussi savoir travailler en équipe puisque les missions de coordination, de régulation, d’ajustement se font avec de nombreux membres de l’Education nationale (éducateurs, psychologues, médecins, assistants sociaux…). L’enseignant en ULIS doit également être organisé, patient et aimer transmettre des connaissances. Enfin, il faut être capable d’identifier rapidement les difficultés des élèves mais aussi être attentif aux moindres réussites …. A chaque jour « une réussite, un petit bonheur » à valoriser !

Quelle formation doit-on suivre pour devenir enseignant en ULIS ?

Pour exercer en ULIS, il faut d’abord être enseignant puis passer une certification. Dans le primaire, le professeur des écoles doit obtenir le certificat d’aptitude professionnelle pour les aides spécialisées, les enseignements adaptés et la scolarisation des enfants en situation de handicap (CAPA-SH). Pour ma part, je suis enseignante spécialisée mais je n’ai toujours pas le CAPA-SH. Je le passe actuellement et j’ai d’ailleurs la chance de bénéficier d’une formation de 14 semaines dans le cadre de cet examen. Cela permet d’avoir des connaissances sur les troubles cognitifs liés au champ du handicap, des connaissances liées à la psychologie de l’enfant et de l’adolescent, de découvrir les différentes structures qui accueillent les élèves en situation de handicap mais aussi d’avoir une bonne connaissance des textes réglementaires.