Louis David, les Sabines arrêtant le combat entre les Romains et les Sabins

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En septembre, la réforme du collège a vue la mise en place des EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires), notamment celui nommé « langues et cultures de l’Antiquité » (LCA).

Résolument opposé à ce dispositif, le collectif « Arrête Ton Char », qui promeut les langues anciennes du primaire à l’université, a rendu publics les résultats d’une enquête, menée auprès de 556 collèges – tout en envoyant une lettre ouverte à Najat Vallaud-Belkacem.

Dans sa lettreArrête Ton Char dénonce « l’importante dégradation de l’enseignement des langues et cultures de l’Antiquité », suite à la mise en place de la réforme du collège. « Notre enquête, ‘Verba ad acta‘, démontre preuves et chiffres à l’appui le démantèlement de l’enseignement des langues anciennes organisé par une réforme qui promettait pourtant ‘le latin pour tous' », écrit l’association.

Les langues anciennes en français : « un vœu pieux »

© Alexi TAUZIN - Fotolia

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Concernant, tout d’abord, l’enseignement renforcé des langues et cultures de l’Antiquité dans le cadre du cours de français, à travers l’étude « d’éléments linguistiques et culturels du latin et du grec ancien », il semble, indique Arrête Ton Char, « que cela restera à l’état de vœu pieux ». Ainsi, écrit l’association, avec des horaires « inchangés ou largement tronqués », le professeur de français « ne dispose pas du temps nécessaire pour augmenter la place à accorder à l’Antiquité ».

Un autre frein « se situe dans la formation des enseignants de lettres », qui ne s’estiment « pas suffisamment formés pour enseigner aux élèves ces éléments linguistiques et culturels du latin et du grec ancien, ou pour étudier, même en traduction, certaines œuvres antiques », note Arrête Ton Char.

EPI LCA : « des difficultés et des inégalités »

Selon l’enquête menée par l’association, la mise en place de l’EPI « LCA » serait « à l’origine de nombreuses difficultés et inégalités ». Commençant en 5e, « alors même que l’Antiquité, abordée en 6e en Histoire, n’est plus au programme d’aucune discipline au cycle 4 », il entraînerait ainsi « une difficulté à trouver des enseignants d’autres disciplines volontaires pour consacrer des heures de cours à son organisation ».

D’après Arrête Ton Char, « contrairement à ce qui a été annoncé », l’EPI LCA « ne bénéficiera pas à tous les collégiens » : ainsi, selon son enquête, 11,3% des collèges sondés n’ont pas organisé cet EPI. L’association constate aussi que 20% des collèges interrogés, et qui proposent l’EPI, « ne l’offrent pas à tous les élèves d’un même niveau », ce qui « interroge sur les critères objectifs d’admission à cet enseignement ».

2015-04 DESSIN Vousnousils encré 03Arrête Ton Char pointe aussi du doigt une « inégalité criante » : la durée de l’EPI LCA, « qui varie considérablement d’un établissement à l’autre », allant ainsi « de 2-3 heures à 72 heures sur l’ensemble du cycle 4 en fonction des établissements ».

En outre, dans 55% des cas, « l’enseignant de lettres classiques n’intervient pas du tout, ou intervient seulement devant une partie des élèves pour l’EPI LCA », note l’association. Concernant l’aspect interdisciplinaire de cet enseignement, « seuls 6,5% de ces EPI seront menés en co-animation », et « dans près de 70% des cas, l’interdisciplinarité se fera chacun dans sa classe respective », déplore Arrête Ton Char.

Dans sa lettre ouverte, l’association demande à Najat Vallaud-Belkacem de « prendre rapidement des mesures », pour éviter que « l’organisation des EPI, sans cadrage clair, aboutisse à de grandes inégalités sur tout le territoire, non seulement en ce qui concerne les connaissances et compétences qui pourront être transmises aux élèves, mais aussi dans le cadre du nouveau Diplôme National du Brevet, qui va désormais évaluer ces dispositifs ».

De « graves conséquences physiques et morales » sur les profs

Enfin, Arrête Ton Char attire l’attention de la ministre sur les « graves conséquences physiques et morales » pesant sur les enseignants de lettres classiques « et les autres ». Ainsi, la mise en place « à marche forcée » de la réforme du collège « n’a engendré que stress et tensions entre les différents acteurs de l’école « .

Selon l’enquête de l’association, « l’année écoulée a été particulièrement rude pour les enseignants de lettres classiques qui, s’ils n’ont rencontré aucune difficulté avec les parents d’élèves et leurs représentants, sont 40% à confesser avoir eu maille à partir au sujet de la place des LCA dans la réforme, non seulement avec leur direction, mais aussi, chose nouvelle, avec leurs propres collègues. »