
Grâce à la classe inversée, Rémi Massé se concentre sur la pratique : ici, la réalisation de slams par les élèves.
Professeur d’éducation musicale au collège Jean Monnet de Lalinde (Dordogne), Rémi Massé s’est lancé dans la classe inversée en 2012. “Je voulais, essentiellement, que les élèves prennent du plaisir à travailler dans mon cours”, explique-t-il. “J’ai connu la musique au collège avec les flûtes à bec, des fiches à rédiger, beaucoup d’écrit… C’était insupportable !”, ajoute l’enseignant.
Afin de faire aimer à ses élèves “un art qui normalement symbolise le plaisir, mais qui est décrié partout et vu comme élitiste”, et de leur “faire découvrir qu’il y a autre chose que la musique fast food”, Rémi Massé a décidé de faire la part belle aux activités de groupe, à travers des “îlots ludifiés” – des mini-groupes, qui travaillent de façon collaborative, en autonomie, en réalisant essentiellement des tâches complexes et des jeux de rôle.
Un « gain de temps » pour une pédagogie active
Sans la classe inversée, “réaliser de telles activités serait plus difficile, car je ne dispose, par classe, que d’une heure de cours par semaine”, explique le prof de musique. Un gain de temps qui permet de privilégier la pratique à la théorie.
Selon le principe de la “flipped classroom”, les exercices sont ainsi réalisés en cours, et les leçons visionnées à la maison, dans des capsules réalisées par l’enseignant. “Ce sont de courtes vidéos, dans lesquelles j’explique des notions musicales, par exemple, ‘qu’est-ce que le tempo’. Les élèves découvrent des notions exactement de la même façon que s’ils m’écoutaient en cours, à ceci près qu’ils peuvent aller à leur rythme”, note Rémi Massé.
Jeux de rôle, tâches complexes : du théorique au concret
En classe, les élèves passent au concret, via des tâches complexes – “des enquêtes à la Sherlock Holmes, qui les obligent à trouver des stratégies pour résoudre des énigmes, et à se plonger totalement dans les notions abordées en vidéo”. Le prof d’éducation musicale préfère volontiers “apprendre à faire, que transmettre uniquement un savoir théorique”, via une “approche ludifiée bien plus motivante, car les élèves sont acteurs des infos qu’ils reçoivent”.
Par exemple, ses élèves de 4e ont découvert un jeu de rôle permettant de découvrir le monde lyrique et l’opéra. Après avoir découvert l’activité à la maison, via des vidéos d’introduction, présentant notamment les règles, les élèves, répartis dans des groupes, effectuent des recherches et réalisent des productions pour terminer le jeu. “L’intrigue est la suivante : un chef d’orchestre s’est fait voler sa baguette : pour la retrouver, les élèves doivent interroger des personnages, chanter, découvrir des instruments…”, décrit Rémi Massé.
« Le rapport au travail a changé »

Un îlot ludifié, dans la classe inversée de Rémi Massé
Avec une telle activité ludique, Rémi Massé remarque “de l’épanouissement” chez ses élèves, “et surtout, une bien plus grande motivation”. Ainsi, remarque-t-il, “avant la classe inversée, 30% seulement des élèves travaillaient vraiment, mais aujourd’hui, ils sont au moins 70%”.
Plus actifs, munis de tablettes numériques, ils créent des morceaux, écrivent des slams, ou encore des “audiobiographies”, dans le cadre d’un projet interdisciplinaire mené avec une collègue, prof de français : “les 3e apprennent à se raconter à l’oral, par les sons. Ainsi, ils explorent les bases de la chanson et la métrique poétique”, explique Rémi Massé.
L’année dernière, l’enseignant a par exemple créé une tâche complexe autour de la date du 21 octobre 2015, “atteinte par le personnage de Marty dans le film Retour Vers le Futur II”, et de la chanson de Guillo, “Si j’étais Marty McFly”. La mission confiée aux élèves : écrire, par îlots, une chanson sur les mêmes accords que cette chanson, en imitant la mélodie dans le couplet, et en imaginant ce qu’ils feraient s’ils pouvaient voyager dans le temps. Après avoir écrit un texte, chaque groupe a mis sa création en musique, chanté, et “manipulé le vocabulaire poétique”.
Pour Rémi Massé, “ces activités permettent de développer l’autonomie, mais aussi le ressenti de la musique”. Le fait de créer des chansons ou d’être simplement en action “est un déclencheur de motivation. Et de conclure : “ce que les élèves apprennent ainsi, ils devraient s’en souvenir pour longtemps. Et qui sait, un jour peut-être, quand ils seront adultes, iront-ils à l’opéra ?”
Je suis scandalisée par le fait que l’école devienne « LUDIQUE » ! L’école doit rester un lieu d’apprentissages et non un endroit d’amusements.
D’autre part, les enfants passent déjà beaucoup de temps sur les écrans et la plupart des professeurs les encouragent dans ce sens. Est-ce nécessaire ??
A la maison, nous luttons justement pour limiter le temps devant les écrans !
Maman de collégiens en colère contre ce système !
On ne va pas à l’école pour jouer.
Bonjour,
Je suis enseignante dans le secondaire spécialisé et je ne suis pas d’accord avec les réactions que je viens de lire.
Votre pratique de cours me paraît très intéressante. Il est évident que les é lèves sont plus impliqués dans leur apprentissage quand ils ont des missions à remplir et que la réussite de cette mission dépend d’eux.
Le jeu est un excellent outil d’apprentissage. Pourquoi le jeu ne pourrait-il pas être utilisé s’il permet un apprentissage plus concret, plus actif et s’il permet d’oublier la contrainte de la tâche?
Les tablettes tactiles plus que les ordinateurs sont aussi un excellent outil d’apprentissage car elles sont plus accessibles et offrent un grand nombre de possibilités de travail. Elles doivent rester une plus value au niveau du travail en classe, c’est pour cela que leur utilisation doit être bien gérée.
Je suis très contente de lire votre article car mon fils qui fait des études d’instituteur a choisi comme mémoire de réaliser un projet pédagogique à partir de la création d’une chanson. Il est donc à la recherche d’articles ou de livres qui pourraient l’aider dans sa tâche. Je lui montrerai votre site avec plaisir!
Merci pour votre échange de travail.