
Maus d’Art Spiegelman : la BD pour “enseigner l’indicible » / Journées de l’Histoire et de la Géographie, Amiens, octobre 2016
Le 20 octobre, dans le cadre des Journées Nationales de l’Histoire et la Géographie, organisées par l’APHG à Amiens, les enseignants d’histoire–géographie ont pu profiter d’une “journée professionnelle”, durant laquelle étaient proposés 43 ateliers et conférences, animés par une soixantaine d’intervenants.
Apprendre l’Histoire avec la BD
Les enseignants avaient le choix entre de nombreuses présentations et retours d’expériences, animés le plus souvent par des professeurs. Parmi les sujets abordés, figure notamment la BD, et son utilisation en classe. Vincent Marie, enseignant d’histoire–géographie à Nîmes, et chercheur en bande dessinée, a ainsi donné des “pistes” pour “inscrire la BD dans une démarche pédagogique”, en se penchant en particulier sur la représentation en dessin de la Grande Guerre.
Les profs d’histoire peuvent aussi utiliser la BD pour “enseigner l’indicible” – comme la Shoah. A travers l’étude d’oeuvres comme Master Race de Bernie Krigstein ou Maus d’Art Spiegelman, les élèves peuvent se pencher sur les choix graphiques et narratifs permettant de représenter ces traumatismes. A ce sujet, Emmanuelle Demaille, enseignante au lycée Cassini de Clermont, a expliqué dans un atelier dédié à Maus comment cette BD permet “d’étudier à travers les dessins, le processus concentrationnaire : la déshumanisation, et comment la machine nazie a mis en place un processus d’élimination physique”.

Édugéo, Développé par l’IGN , fournit des données cartographiques et des outils de croquis en ligne pour réaliser des cartes légendées / Journées APHG
Jalons, Édugéo : des outils numériques pour une Histoire 2.0
D’autres ateliers ont permis aux enseignants de découvrir des outils utiles pour créer leurs cours – notamment Jalons, une plateforme de ressources créée par l’INA, qui propose un accès gratuit à 17.000 documents audiovisuels et permet d’explorer l’histoire des relations internationales, de la vie politique française, ou encore de l’histoire des régimes totalitaires.
Autre outil intéressant pour les profs d’histoire-géo, présenté par Jackie Pouzin, enseignant au lycée Vadepied d’Evron : Édugéo. Développé par l’IGN (Institut de l’Information Géographique), ce service en ligne fournit de nombreuses données cartographiques et photographiques (photos aériennes, données topographiques, cartes de Cassini, cartes littorales, carte de l’État Major) et des outils de croquis en ligne pour réaliser des cartes légendées. En juxtaposant plusieurs cartes et photos, les élèves de Jackie Pouzin ont notamment appris à délimiter les contours d’une ville pour étudier son développement à travers le temps. Ils ont aussi pu analyser les dégâts provoqués par la guerre 14-18 à Verdun, en comparant des cartes d’Etat Major, les tracés des lignes de front, et une carte actuelle de la Meuse.
Face à « l’instrumentalisation » de l’Histoire
Lors d’une conférence dédiée à l’enseignement de l’histoire–géographie, Bruno Benoit, président de l’APHG, et Eric Fottorino, cofondateur de l’hebdomadaire Le 1, se sont penchés sur les défis posés aujourd’hui aux professeurs et aux historiens.

Bruno Benoit, président de l’APHG, était entouré par des journalistes : Eric Fottorino ( 1 Hebdo), Daniel Muraz (le Courrier Picard) et Olivier Da Lage (RFI).
“Face à la tyrannie de l’instant présent, le risque est une perte de mémoire”, s’inquiète Eric Fottorino, qui avertit les enseignants, qui devront “de plus en plus” faire face à “des hommes politiques qui essaient de s’emparer de l’Histoire, au service de leurs discours”. Pour l’ex-directeur de la rédaction du Monde, “les profs d’histoire ont plus que jamais pour mission de développer l’esprit critique des élèves, en leur montrant comment l’Histoire peut être détournée, réinventée, y compris dans nos démocraties”.
Défendant la “liberté pédagogique” des enseignants, Bruno Benoit a en outre critiqué les “nouveaux programmes” et la réforme du collège, qui “empêchent les profs de donner envie aux élèves d’aller au-delà”.
Intervenant dans la salle, Vincent Magne, professeur au lycée de Troyes, a mis le doigt sur le principal défi auquel il est confronté : “l’histoire–géo demande du temps. Or, on nous demande de former les citoyens, de les emmener jusqu’aux examens, de leur donner le goût pour la discipline, de capter leur attention… tout ça sans nous donner assez d’heure pour expliquer ! Pendant ce temps, un simple clic suffit à l’élève pour se rendre sur Wikipedia ou Google…”
Enfin, un atelier était animé par Benjamin Stora, historien et professeur à Paris-XIII. Spécialiste de la guerre d’Algérie, il est revenu sur les difficultés posées à un historien désireux d’écrire sur ce sujet, qui “a laissé des traces des 2 côtés de la Méditerranée” : les “batailles” entre différents “groupes de mémoire” (ex-partisans de De Gaulle ou de l’OAS, défenseurs de Messali Hadj…), le difficile accès aux archives, mais aussi, encore, “l’instrumentalisation de l’Histoire à des fins politiques” – notamment par des “hommes politiques soucieux de faire plaisir à leurs clientèles”.
Modération par la rédaction de VousNousIls. Conformément à la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. Pour exercer ce droit adressez-vous à CASDEN Banque Populaire – VousNousIls.fr 1 bis rue Jean Wiener – Champs-sur-Marne 77447 Marne-la-Vallée Cedex 2.