Après la vague d’attentats qui a récemment frappé la France, le ministère de l’Éducation nationale avait annoncé des nouvelles mesures de sécurité pour cette rentrée 2016. Parmi elles, des exercices « attentat-intrusion », qui simulent une attaque afin de tester les capacités des équipes pédagogiques et des élèves à s’enfuir ou à se cacher.
« Vous êtes tous morts »
Amélie, une professeur d’histoire-géographie raconte dans l’Express l’exercice qui s’est tenu dans son établissement, situé dans l’Essonne. Elle était confinée avec des élèves dans une salle qui ne pouvait pas être verrouillée de l’intérieur.
C’est alors que l’élu chargé du contrôle de l’exercice a brusquement ouvert la porte en s’exclamant : « Vous êtes tous morts! ». Selon l’enseignante, « les élèves étaient assis en silence sur le sol, surpris d’une telle entrée. Clairement, ils avaient eu peur ». Pour l’élu, ceci était une manière de faire « prendre conscience du danger », mais pour Amélie, certains élèves étaient en état de choc après cette boutade.
Elle estime que ces exercices sont anxiogènes et participent au sentiment d’insécurité des élèves :
« Les élèves ne vivent plus l’établissement comme un lieu où ils sont en sécurité. Tout à coup, leur école devient un endroit où ils peuvent être victimes du terrorisme. »
« Nous sommes des enseignants, pas des spécialistes du terrorisme »
Des professionnels avaient déjà tiré la sonnette d’alarme à propos de ces exercices. Pierre Favre, président du Syndicat national des écoles (SNE) et directeur d’une école primaire et élémentaire a révélé à LCI les exercices qu’il comptait réaliser dans son établissement.
Des exercices élaborés avec une certaine liberté par rapport aux recommandations du ministère, qui exigent une « simulation ». Pierre Favre a opté pour des exercices plus ludiques qui ont pour but de créer « une habitude en matière de sécurité » plutôt qu’un sentiment de peur : « on ne va pas dire aux enfants de trois ans qu’il y a des méchants qui attaquent ». La pédagogie est de mise, pour éviter certaines situations où des enfants ne voudraient plus aller à l’école à cause des « méchants ».
Également interrogé par LCI, Jérôme Lambert, secrétaire départemental du SNUIpp-FSU Paris, estime que ces exercices ne relèvent tout simplement pas du métier d’enseignant : « On va être plein de bonne volonté, mais nous sommes des enseignants, pas des spécialistes du terrorisme. On se retrouve avec une équipe de professeurs des écoles autour d’une table, qui se demandent quelle armoire déplacer, dans quel couloir aller. C’est comme si on demandait à des citoyens d’assurer la sécurité de leur quartier ».
Les établissements scolaires ont jusqu’aux vacances de la Toussaint pour réaliser leurs exercices « attentat-intrusion » obligatoires.
Si la sécurité commençait déjà par des visites médicales pour les enseignants, l’organisation du personnel de premier secours par étage et des évacuations incendies 2 fois par an avec la vérification du matériel.
Pas sûr que les basiques soient déjà maîtrisés.
Etant enseignant, nous n’avons pas les moyens (sonnerie différente de celle pour les interclasses/incendies) d’identifier rapidement la menace…
Ensuite, on nous demande de s’enfermer dans nos salles… Qui ont des cloisons minces et des parties « vitrées » qui donnent sur le couloir. Les salles sont déjà petites (prévues pour 24 personnes à une époque où la norme de l’éducation prioritaire était d’avoir des classes à 20 élèves max), il est impossible de s’y cacher. Bref, en cas d’attaque, on nous demande d’attendre d’être mort, qu’on respecte les consignes ou non. Je pense qu’en cas de réelle attaque, je désobéirais sans hésiter pour avoir une chance de survie… (il y a selon moi une solution qui permet la fuite, mais la fuite n’est pas jugé être une option, mieux vaux attendre selon ceux qui décident pour nous de voir la fenêtre donnant sur le couloir explosé en morceaux…)
Et accessoirement, s’il faut se séparer des élèves qui ne peuvent se déplacer (on ne peut pas fuir en portant un élève en fauteuil roulant…) et bien… Désolé pour eux mais c’est comme cela. Je n’estime pas être responsable de la sécurité de nos élèves quand on nous explique que le nombre d’individus fichés S situés dans la région est assez élevé et que personne ne semble vouloir accepter qu’en ces temps troublés, le principe de précaution prime (je considère que si un individu fiché S a obtenu sa fiche, il a certainement enfreint la loi…)
J’aurais d’autres commentaires sur le sujet, mais il me semble que cela ne soit pas au gout de nos politiques…