La commission des Finances de l’Assemblée nationale a marqué mardi son désaccord avec les coupes budgétaires prévues par le gouvernement dans des fonds du CNRS et du CEA à hauteur de 114 millions d’euros, sur fond de vives protestations dans la recherche.

Dans une salle inhabituellement garnie pour un mardi à la mi-journée et après une vingtaine d’interventions, de gauche et de droite, les membres de la commission ont suivi l’avis de la rapporteure générale Valérie Rabault (PS) sur les « difficultés » des annulations de crédits touchant la Recherche et l’Enseignement supérieur.

« Au regard des enjeux de recherche de la France », la ponction globale de 114 millions d’euros en 2016 sur le Commissariat à l’énergie atomique et le Centre national de la recherche scientifique, « part importante de la trésorerie des deux opérateurs », « peut endommager de manière durable l’effort de recherche mené », est-il écrit dans le quatrième volet de l’avis, consultatif, sur un projet de décret d’avance détaillant plus d’un milliard d’euros d’économies.

La rapporteure générale y « recommande » de renoncer à ces annulations de crédits, jugeant que « d’autres solutions peuvent être envisagées pour respecter l’équilibre budgétaire, sans avoir à impacter l’effort de recherche ».

Cet avis avait été écrit « avant que des tribunes puissent émerger sous des signatures extrêmement importantes », a tenu à préciser Mme Rabault, dans une allusion aux sept prix Nobel français et au lauréat de la Médaille Fields ayant dénoncé lundi la décision gouvernementale comme « un suicide scientifique et industriel ».

Chef de file des socialistes de la commission, Dominique Lefebvre, qui aurait préféré une rédaction alternative, a évoqué les assurances gouvernementales que les économies ne viseraient que fonds de roulement et trésorerie.

La ministre de l’Education Najat Vallaud-Belkacem a affirmé, lors des questions au gouvernement, que les coupes « n’auront aucun impact sur l’activité des organismes de recherche », disant que « le gouvernement a toujours soutenu la recherche et continuera ».

En commission, des députés PS, Front de Gauche, LR, UDI, ou non inscrits comme Jean Lassalle, ont exprimé des inquiétudes sur l’impact des coupes sur les organismes concernés, « la compétitivité » du pays, « son image ».

« Se tirer une balle dans le pied »

« Nous sommes tous attachés à la bonne gestion des finances publiques », mais ces coupes de 256 millions reviendraient pour la France à « se tirer une balle dans le pied pour très longtemps », a ainsi lancé Karine Berger (PS), affirmant que ce n’était « pas une question politique ».

Pointant « au pire une maladresse du gouvernement, Pascal Cherki (PS) a plaidé pour « rectifier » la copie. D’accord à ce stade pour ne pas avaliser les 114 millions d’euros, Christophe Caresche (PS) a néanmoins jugé « pas totalement scandaleux que le gouvernement essaye de récupérer des crédits pas utilisés ».

Dans les voix critiques à droite, Patrick Hetzel (LR) a dénoncé « une faute scientifique mais aussi politique majeure ».

L’opposition devrait être « moins revendicative », vu « une baisse de 12% du budget du CNRS en 2012 », avant le retour de la gauche au pouvoir, a riposté Christophe Castaner (PS).