Vous êtes membre de Polychrome. En quoi consiste votre structure et quels sont ses principaux objectifs ?
Le collectif Polychrome est né de contacts entre professeurs d’arts plastiques de toutes les académies qui s’interrogeaient sur la mise en place de la réforme du Lycée. Nous souhaitons à travers cette association communiquer et informer sur la discipline mais aussi défendre et valoriser l’enseignement des arts plastiques. Le site internet de Polychrome est notre principale plateforme d’échanges.
Comment devient-on professeur d’arts plastiques ?
Le professeur de collège ou de lycée doit être reçu au CAPES arts plastiques et à l’agrégation. Il n’y a pas de différence avec les enseignants d’autres disciplines, c’est exactement la même procédure.
Quelles sont les problématiques auxquelles sont confrontés les professeurs d’arts plastiques ?

Élèves de l’enseignement de spécialité arts plastiques du lycée Dessaignes à Blois, s’appropriant le dispositif de Inside Out Project de l’artiste JR dans les anciens fossés du château, le 22 avril 2016 ».
Nous avons moins d’élèves en lycée depuis qu’une structure informative très opaque (logiciel Affelnet) gère le recrutement des élèves en fin de troisième. Plusieurs critères sont en effet pris en compte par ce logiciel (mixité sociale, secteur, moyenne scolaire…) mais jamais la motivation des élèves à poursuivre en spécialité en série L !
De plus, une nouvelle option a été créée : « Droit et enjeux du monde contemporain ». Celle-ci pose un réel problème pour les arts plastiques car plus on multiplie les options, moins il y a théoriquement d’élèves dans chacune. D’autant plus que l’option « Droit et enjeux du monde contemporain » ferait valoir un travail moins soutenu et une bonne note plus facile à obtenir lors des examens en Terminale…
Les enseignements d’exploration (EdE) arts visuels ont aussi été catastrophiques pour les disciplines artistiques. En plus de n’être pas toujours assurés par des professeurs compétents et formés, ces enseignements ont un programme qui n’a aussi rien à voir avec les arts plastiques. Il est composé d’un étrange mélange comportant aussi bien des questions d’orientation que des visites d’exposition. Nous faisons également face à une perte considérable d’heures d’enseignement. Avant la réforme de 2010, nous avions une option de détermination de 3h en arts plastiques et une autre de 3h en cinéma audiovisuel pour les élèves de seconde. Aujourd’hui, nous n’avons qu’1h30 en tout !
Aujourd’hui, quelles sont vos revendications ?
Avec toutes ces problématiques, la filière L est encore plus fragile qu’avant la réforme de 2010. Les options de disciplines artistiques, qui la renforçaient avant 2010, sont précarisées, vidées de leurs effectifs. Polychrome souhaite qu’on analyse les transformations effectuées par la réforme du lycée de 2010 et son échec lamentable sur la série L comme sur les disciplines artistiques ! Nous demandons que ces échecs mènent à une nouvelle réforme visant à valoriser les enseignements artistiques. Nous pouvons aussi contribuer à renforcer la filière L, si on favorise mieux l’enseignement de spécialité arts plastiques par un recrutement plus nourri (hors du secteur strict du lycée).
Et qu’en est-il des arts plastiques dans l’enseignement supérieur ?
Après le bac, les filières en arts plastiques sont multiples : les étudiants peuvent intégrer une CAAP (Classe d’Approfondissement en Arts Plastiques), une école d’Art, la Manaa (Mise à niveau en Arts Appliqués) ou bien aller directement à l’université en passant une licence et un Master d’art. Après l’obtention de leur diplôme, plusieurs débouchés s’offrent à eux : ils peuvent devenir professeur d’arts plastiques, photographe, graphiste, designer… Rien ne les empêche également de s’orienter vers des métiers plus traditionnels comme la peinture, la sculpture ou le dessin…
En général, les élèves sont-ils intéressés par cette discipline ?
Oui, énormément ! En arts plastiques, comme dans toute autre matière, nous avons des élèves incroyables avec de très bons résultats scolaires, des élèves moyens mais motivés et des élèves en difficulté, souvent psychologique, que nous arrivons à repêcher par le biais du dessin. Ces élèves ont une conscience visuelle, et à partir d’une pensée en va-et-vient entre la réalisation pratique et l’intellect, ils acquièrent un rapport au monde plus confiant et plus ouvert, dans un âge adolescent difficile où ils cherchent leur identité.
Que pensez-vous de la formation continue des professeurs d’arts plastiques ?
J’ai bénéficié d’une année de formation et je trouve cela merveilleux mais sur une carrière entière ce n’est pas suffisant. Les chercheurs à l’université ont le droit tous les 3-4 ans de bénéficier d’un semestre pour se former. Ce serait génial si on en faisait autant pour les professeurs de lycée et de collège. Il y a tout un développement possible à faire sur la formation continue. Un professeur est trop bloqué dans sa carrière, il faut lui donner la possibilité de se former : cela rendrait le métier plus attractif, les professeurs seraient heureux et motivés d’apprendre de nouvelles choses, d’approfondir leurs connaissances dans leur discipline ou même de pouvoir se réorienter.
Nous sommes aussi dans une période où les technologies sont considérablement développées. Nous devrions ainsi apprendre continûment à nous servir de nouveaux logiciels et bénéficier de plus de stages TICE.
Pourquoi opposer l’option « les arts plastiques » et celle de « Droit et enjeux du monde contemporain » ? Diversifier les options offertes dans la filière L permet d’aider à motiver des élèves avec des envies différentes.
On ne peut pas mettre de liens entre une fin de troisième et une option de TL.
C’est le législateur créateur de la réforme de 2010 qui oppose ces deux disciplines, pas les collègues ! D’un côté les Arts plastiques dont les racines sont profondes et fécondes et de l’autre un enseignement créé de toutes pièces, sans fondation (fondement ?) et ne révélant que des qualités déjà valorisées par ailleurs : apprentissage, norme, restitution. Tout le contraire des AP…
La main de l’homme, depuis son avènement, s’exprime plastiquement. Il développe ses compétences et ses savoirs ENSUITE ou EN MEME TEMPS. Voilà bien pourquoi, à l’Ecole, les arts plastiques devraient être mis sur un plan identique – au moins jusqu’en 3ème – sur le Français et les mathématiques. Tel n’est pas le cas. On voit, chaque jour, les résultats (qui ne cesseront de se dégrader, évidence des évidences).