Prof de français au collège de Guilers, Jean-Marie Lejeune avait l’impression “d’être bloqué”, entre des moments “où faire travailler les élèves autour de pédagogies de projets était très stimulant”, et d’autres “où il fallait retourner au cours magistral, avec la posture du prof autoritaire”.
Puis il découvre un système pour concilier pédagogie active et programme : la classe inversée. Il commence alors à se filmer, en train de “faire son cours” devant un diaporama diffusé au tableau – sur le modèle d’Annick Arsenault Carter, pionnière canadienne de la classe inversée.
Humour et vidéos décalées
L’enseignant a tout de suite eu l’idée de “mettre de l’humour” dans ses vidéos : “quand je faisais mes cours magistraux, je faisais beaucoup de blagues, et j’ai voulu qu’elles me suivent dans mes capsules”, indique-t-il.
Le prof a fini par “jouer à fond le jeu de l’humour”. Il a ainsi scénarisé ses capsules, “de plus en plus, jusqu’à me déguiser et à créer des personnages, comme Superlatifman”. Pour Jean-Marie Lejeune, “il s’agit d’une façon d’attirer les élèves, de dédramatiser le cours et de leur permettre d’apprendre en riant”.
Attention toutefois “à ne pas les perdre par le côté humoristique et scénarisé”, prévient l’enseignant, qui s’efforce de concevoir des diaporamas “très clairs, résumant bien la notion abordée”. Le prof essaie ainsi « de garder un bon équilibre entre l’humour, qui n’est qu’un emballage, et le cours ».
Pédagogie active
Dans ses vidéos, Jean-Marie Lejeune aborde avant tout “les notions grammaticales, qui demandent le plus de concentration, d’attention, et aussi d’explications de la part du prof”. Les élèves regardent les capsules chez eux (mais aussi au CDI ou en classe), puis doivent répondre à un QCM de 10 questions.
En classe, place à la pédagogie active. Les élèves sont répartis en îlots, par groupes de 4, avec des “cartes de rôle” qui les rendent autonomes : un ado occupe la fonction de “maître du temps”, un autre celle de “maître de la parole”, par exemple.
Le professeur distribue en amont aux groupes un “plan de travail” à gérer “comme ils le veulent”. Il s’agit en fait du “programme” de la séquence, composé des activités prévues en classe, mais aussi des capsules à visionner, et d’un corpus de textes. “Pour garder une démarche inductive, il faut que les élèves aient besoin de regarder une vidéo pour comprendre un texte”, explique l’enseignant. “Je pars toujours d’un texte à lire, au programme, auquel je fais correspondre des activités et une capsule”, ajoute-t-il.
Une fois le plan de travail du jour “bouclé”, les élèves disposent d’un “temps libre” pour mener, en toute autonomie, des projets autogérés – rédaction d’une poésie, conception d’un journal papier, écriture d’un court-métrage -, en lien avec le programme.
Co-construction
Un jour, face à un problème technique, quelques élèves de 4e lui ont proposé de l’assister, en le filmant avec leurs téléphones portables. “Ils m’ont aussi conseillé de diffuser les vidéos sur Youtube, car je ne trouvais pas de solution pour les stocker sur le réseau du collège”, se souvient J-M Lejeune.
L’enseignant a essayé de nourrir cette implication des élèves, en “montant une équipe” d’élèves de 4e – chargés de réaliser (sur le temps du midi) les montages, de filmer, ou de “faire défiler les diaporamas au bon moment”.
Depuis 2014, les élèves créent leurs propres capsules (du tournage au montage), avec un scénario, une mise en scène, des blagues et une façon “scénarisée” d’aborder des notions de français. Ainsi, “ils deviennent acteurs. Le savoir est en mouvement, il n’est plus à plat dans un livre : ils le font vivre”.
En réalisant des capsules, les adolescents “finissent par maîtriser totalement les notions”. L’enseignant remarque ainsi que “pour réussir à expliquer quelque chose à ses camarades en vidéo, il faut d’abord connaître au maximum le point présenté”.
Ses élèves “travaillent également leur expression orale” lors des tournages, “en plus de prendre confiance en eux”, indique-t-il. Grâce à la co-conception, ses classes “apprennent à travailler en collaboration et à prendre des initiatives”. Plus actifs que dans une situation pédagogique traditionnelle, ils “retiennent et comprennent bien mieux le programme”, remarque Jean-Marie Lejeune.
“Du face à face au côte à côte”
Avec cette forme originale de classe inversée, l’enseignant a “abandonné sa posture autoritaire” – de par l’humour de ses vidéos, mais aussi par le travail en îlots, qui favorise “le passage du face à face, au côte à côte”. Ainsi, Jean-Marie Lejeune passe de groupe en groupe, “plus comme un accompagnateur, que comme un directeur”.
“Moins focalisé sur le contenu”, l’enseignant “regarde davantage la façon dont les élèves travaillent”. Il s’intéresse ainsi davantage à la méthodologie, incarnant aussi un rôle de “coach”. Entre le prof et sa classe, “une nouvelle énergie a émergé, une émulation” qu’il trouve “bien plus épanouissante” – pour lui et pour ses élèves.
« Superlatif et comparatif »
Une vidéo conçue par les élèves de Jean-Marie Lejeune
Vidéo « Superlatif et comparatif »
Toutes les images projetées sont-elles libres de droits ?
Sauf erreur de ma part : La propriété intellectuelle protège les bandes dessinées de deux manières principales : par le biais du droit d’auteur et par le biais de la législation sur les marques. Le droit d’auteur protège un scénario, des personnages et des éléments graphiques originaux et donne aux créateurs les moyens de contrôler la façon dont leurs œuvres et les personnages qu’ils créent sont utilisés.
Est-ce vraiment le droit d’auteur la seule question que soulèvent ces vidéos??? Est-ce vraiment ça le message à faire passer?
Oui, la grammaire ça n’est pas « marrant », mais est-ce que tout l’enseignement doit être une immense blague???
L’humour oui, le ridicule non.
« Pour garder une démarche inductive (sic), il faut que les élèves aient besoin de regarder une vidéo pour comprendre un texte. » Tout est dit.
Qu’apportent vraiment ces scénettes (où un professeur se plait à se ridiculiser) par rapport à un cours traditionnel ? Les élèves maîtrisent-ils effectivement la grammaire ? Lisent-ils ?
La ‘flipped classroom’… ça fait flipper cette « innovation ». Quant à cet « enseignant », il faut reconnaître qu’il ose tout le bougre! Mais comme disait Audiard, c’est à ça qu’on les reconnait… Au delà du ridicule absolu de la situation, il y a de quoi s’interroger réellement et de façon urgente sur les motivations des idéologues qui autorisent ce genre d’aberration surréaliste.