AFPENDans l’Aude, un enfant de 3 ans a été suspendu temporairement d’une maternelle en raison de son comportement violent. L’équipe pédagogique et l’inspecteur académique ont invité la mère à scolariser son fils dans un autre établissement. Pensez-vous que l’on puisse exclure un enfant de la maternelle et est-ce la meilleure solution ?

L’école maternelle française accueille tous les enfants y compris ceux qui ont des difficultés. Lorsque le comportement de l’enfant le nécessite, le directeur de l’école réunit une « équipe éducative » (parents, enseignant, médecin, psychologue scolaire et soignants éventuels). Cette équipe est un outil institutionnel qui permet de faire circuler l’information et de croiser les regards autour d’un enfant en recherchant la plus grande adéquation entre les besoins de l’enfant et les solutions à mettre en œuvre.

Nous pouvons, par exemple, demander aux parents de ne plus scolariser l’enfant pour une période temporaire en leur demandant de prendre contact avec le Centre d’Action Médico Sociale Précoce (CAMSP), sans pour autant l’exclure de l’école. Par la suite, nous pouvons re-scolariser l’enfant sur des temps précis en présence d’une auxiliaire de vie scolaire. Avec des aides spécifiques et adaptées à son profil, l’enfant peut rapidement progresser.

Quelquefois, la communication entre l’école et les familles peut être problématique. Les parents réagissent de façon excessive car ils se sentent jugés ou atteints de façon narcissique. Les conseillers pédagogiques ou l’inspecteur de la circonscription peuvent alors se déplacer pour tenter de médiatiser les possibles conflits entre la famille et l’école. L’accompagnement des familles est, dans tous les cas, indispensable à la prise en compte des spécificités de l’enfant.

Il faut également rappeler que l’école maternelle n’est pas obligatoire mais elle est souhaitable. Tout doit ainsi être mis en œuvre pour que l’adaptation de l’enfant aux règles de la collectivité et aux apprentissages puisse se faire dans les meilleures conditions possibles.

A 3 ans, comment peut-on être violent ?

Quelle que soit la situation familiale, un enfant violent à 3 ans, ce n’est pas normal. Il faut automatiquement s’interroger sur le parcours de l’enfant. Pour cela, nous devons interpeller la psychologue scolaire et la famille afin de réfléchir sur l’origine de ce comportement. A 3 ans, il n’y a pas de volonté de violence. Si l’enfant a un comportement violent cela est dû à une pathologie et à une souffrance, ou à une atteinte au fonctionnement du groupe classe avec de possibles mises en danger de l’enfant lui-même ou des autres.

Quels sont les outils de l’Education nationale ?

Les outils restent le professionnalisme de ses membres, la capacité d’observation et de mise en lien des informations et des personnes. L’enseignant est le premier interlocuteur de la famille, le directeur de l’école accompagne la compréhension de la situation, le psychologue scolaire, l’infirmière et le médecin de PMI sont présents dans les écoles auprès des enfants en difficulté et de leurs familles. Ils apportent des éclairages spécifiques au sein de l’école mais peuvent aussi accompagner les parents vers des services de soins extérieurs. Ces derniers sont assurés par les départements de soins tels que le CMP ou le CAMSP.

Pour les enfants violents, l’Education nationale dispose de peu de moyens. La diminution des postes de RASED, voire la disparition des maîtres G -qui intervenaient beaucoup dans des actions de prévention en maternelle- se fait aussi sentir de façon importante aujourd’hui.

Ne faudrait-il pas aussi former les enseignants à la psychologie de l’enfant ?

Il y a tout un travail à faire sur la formation des enseignants. Comme tous les enseignants, ceux des classes de maternelle développent une expérience pratique. Celle-ci devrait se compléter d’apports théoriques. Les enseignants devraient en effet avoir des connaissances sur les différents types de troubles auxquels ils peuvent être confrontés. Pour cela, les psychologues doivent intervenir en formation initiale et continue auprès des enseignants.

Y-a-t-il suffisamment de psychologues de l’Education nationale ?

Aujourd’hui, il y a près de 3000 postes de psychologues du premier degré dont 400 non pourvus. L’AFPEN revendique un psychologue scolaire pour mille élèves. Actuellement, je suis en charge de 1900 élèves. Des collègues en ont, quant à eux, 5000. Il y a une réelle problématique d’équité, d’accès à l’accompagnement et de qualité de travail.

 

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