A la rentrée des classes, alors que 2,2 millions de lycéens ont poussé les portes de leur établissement, d’autres sont restés à l’entrée. Pas par manque d’intérêt pour les études, mais parce qu’ils souffrent d’une pathologie baptisée “phobie scolaire”.
En 2007, le Centre Médical et Pédagogique (CM&P) de Rennes Beaulieu, structure “soins-études” de la Fondation Santé des Etudiants de France et annexe pédagogique du lycée Chateaubriand (qui accueille des élèves dont l’état de santé ne permet pas une intégration scolaire ordinaire), a mis en place un dispositif de rescolarisation.
Baptisé la “classe projets”, il est destiné aux jeunes, âgés de 15 à 20 ans, désireux de reprendre les études, mais qui en sont incapables, à cause d’une souffrance psychique qui se traduit par une déscolarisation et des difficultés de socialisation.
« Renouer avec le plaisir de partager son savoir »
La classe projets accueille des jeunes admis au lycée, de niveau seconde à terminale. “Pour intégrer cette classe il faut être volontaire et avoir envie de renouer avec la scolarisation. L’objectif final est la réintégration d’un cycle normal de formation”, explique Laurence Gauvin, proviseure adjointe de l’annexe pédagogique du Lycée Chateaubriand.
“Le but est de motiver l’adolescent, de le faire redevenir acteur de son projet scolaire, afin de lui permettre de renouer avec le plaisir de partager son savoir avec ses pairs”, indique Laurence Gauvin. “Il a les capacités nécessaires pour suivre des études, mais s’il a quitté l’école, c’est à cause de sa peur du jugement et du regard des autres”, ajoute-t-elle.
Phobie scolaire, phobie sociale et regard des autres
Plutôt que d’utiliser le terme “phobie scolaire”, la proviseure adjointe préfère parler de “phobie sociale”. Les jeunes accueillis “ont pour point commun la perte de l’estime de soi, indispensable à la continuité de la scolarité”, note-t-elle.
Les jeunes de la classe projet n’ont pas “peur de l’école : ils veulent étudier, ils aiment apprendre. Mais ils ont un problème avec le regard de l’autre. Les mauvaises notes, le jugement des camarades, des parents ou des profs, deviennent insupportables et les empêchent d’étudier”, indique Laurence Gauvin.
Les jeunes accompagnés vers la rescolarisation présentent une grande variété de pathologies psychiatriques, ou de troubles psychiques, à l’origine de leur phobie. Le dispositif prévoit un suivi psychologique en parallèle, auprès des psychiatres du CM&P.
« La peur du groupe se dissipe »
La “classe projets” est une structure pédagogique différente d’une classe “classique” : l’effectif est réduit à un groupe d’une dizaine de jeunes, et le dispositif fonctionne par cycles successifs, sans référence à un programme.
Les élèves ne sont scolarisés que l’après-midi, les matinées étant consacrées aux soins. Pendant 6 semaines, chaque semaine, les élèves travaillent autour d’un thème, seuls ou par groupe de deux, sans être notés – “la notation étant une source d’anxiété à bannir”.
Les élèves effectuent des recherches au CDI, encadrés par des enseignants tuteurs et une professeure documentaliste. En fin de semaine, chacun présente, devant le groupe, sa recherche, sous la forme de son choix – “la liberté de création est totale : ça peut être un extrait de livre, de musique, un objet, et pas seulement un power point”, explique Laurence Gauvin.
Pendant le “temps de restitution”, le jeune “présente un sujet qui lui plaît à la base, et à cet instant, il réussit à intéresser les autres. Il leur apprend des choses, échange avec eux. Un partage se crée, c’est valorisant, et la peur du groupe se dissipe”, explique la proviseure adjointe.
Un “séjour de rupture” est aussi organisé : pendant 4 jours, les jeunes partent pour une “destination inconnue”, en Europe – le but étant de les faire “lâcher prise” et de créer un collectif.
Une « cure d’estime de soi »
A la fin de la classe projets, pendant 4 semaines, les jeunes “ne sont plus en groupe”. Ils partent en “immersion” dans une classe ordinaire. A l’issue de cette expérience, les élèves peuvent choisir de retourner en classe au CM&P, qui dispense un enseignement adapté, de la seconde à la terminale. Ils peuvent aussi choisir de retourner dans leur lycée d’origine.
“Il ne s’agit pas d’une remise à niveau : les compétences des jeunes sont déjà là. C’est plus une ‘cure’ d’estime de soi, qui permet le retour à la normalité, à la scolarité”, remarque Laurence Gauvin. Selon elle, depuis 2011, la reprise de scolarité suite à la classe projets avoisine les 92%.
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