Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

L’impression 3D se développe – dans l’industrie, mais aussi à l’école. Pour Christophe Alasseur, professeur de technologie au collège François Furet, à Antony (Hauts-de-Seine), l’utilisation d’une imprimante 3D, procédé de fabrication encore relativement original, a de multiples avantages.

“D’abord, c’est l’occasion de susciter chez les élèves curiosité et motivation”, note-t-il. Cette technologie, qui permet un prototypage rapide, “permet aussi de maintenir” dans ses groupes “une bonne dynamique”. Elle donne enfin à ses élèves un “droit nouveau” : le droit à l’erreur.

Expérimentation et modification

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

En 2012, le collège de Christophe Alasseur est doté par la société A4 Technologie d’une imprimante 3D. L’enseignant essaie alors de développer une séquence basée sur l’utilisation de l’impression 3D, dans le cadre de ses cours de technologie – “surtout en 3e, où le programme contient une forte partie de réalisations sur projets”.

Il développe un projet, qui consiste à “donner aux élèves un travail à effectuer sur une pièce précise, un pignon avec son excentrique”. Ce pignon, qui fait partie d’un distributeur automatique de savon, ne fonctionne pas. “Aux élèves de le modifier, de le redessiner, pour ensuite l’imprimer et le tester”, explique l’enseignant.

L’intérêt d’un tel projet, pour les élèves, “c’était de pouvoir redessiner et modifier une pièce, puis de l’imprimer pour pouvoir la tester immédiatement”, explique Christophe Alasseur. Ainsi, les élèves ont-ils “le droit à l’erreur : ils sont sur une phase d’expérimentation, ils peuvent tester ce qu’ils ont modifié, tout en ayant le droit de se tromper”.

Créer des pièces « qui n’existaient pas »

Après avoir reconduit ce projet pendant deux ans, Christophe Alasseur décide en 2014 de passer à l’étape supérieure : la création. “Mes élèves ont développé des pièces qui n’existaient pas dans le commerce. L’idée est la suivante : j’ai besoin d’une pièce, elle n’existe pas, alors je vais l’inventer”, décrit le professeur de technologie. “Avec l’impression 3D, il n’y a presque pas de limites : on peut créer ce que l’on veut, à une seule condition : savoir dessiner”, ajoute-t-il.

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Pour permettre à ses élèves de 3e de créer en toute liberté, Christophe Alasseur leur apprend à utiliser des logiciels de modélisation volumique (utilisés pour créer des objets en 3D) dès la 4e. “A ce moment là, ils sont encore dans l’abstrait, il s’agit d’acquérir les bases d’utilisation des logiciels Google SketchUp et SolidWorks, afin qu’ils puissent ensuite passer au concret en 3e : créer des objets”, note-t-il.

Durant l’année écoulée, les 3e de Christophe Alasseur ont créé leurs propres distributeurs automatiques pour chat. “L’idée, c’est que le propriétaire d’un chat part en week-end, et son animal a besoin d’être alimenté. La mission des élèves est de concevoir un système de distribution de croquettes et d’eau”, explique-t-il.

Les projets des élèves, répartis dans de petits groupes, se sont étalés sur toute une année. “Ils ont commencé par la phase de réflexion (avec le montage d’un dossier et une présentation du projet au professeur), puis ils sont passé à la création-modélisation de solutions, avant le lancement des impressions, qui valident ou non leurs recherches, les rendent concrètes”, détaille Christophe Alasseur. Au cours de ces projets, les élèves mobilisent plusieurs compétences : “l’analyse d’une demande, la recherche de solutions, et la maîtrise technique de la modélisation 3D”.

Une « technologie source de motivation »

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Pour le professeur, l’impression 3D est une technologie “source de motivation”. Il constate que ses élèves “sont bluffés par cette machine qui crée sous leurs yeux ce qu’ils avaient imaginé”. Et d’ajouter : “pour eux, c’est quelque chose de gratifiant. Pour certains élèves peu à l’aise avec ma matière, cette technologie qui permet de sortir de l’abstrait donne un petit coup de boost”.

Christophe Alasseur anime aussi, en parallèle, un atelier ouvert à tous les élèves désirant développer leurs projets personnels, dans la durée : “il y a dans le collège des élèves intellectuellement précoces, qui fourmillent d’idées, et pour qui l’impression 3D est l’occasion de créer et d’inventer”.

Ainsi, un élève de sa classe a-t-il inventé, lors de cet atelier, une lampe à gravité. “C’est une petite génératrice, qui tourne avec une masse suspendue à une chaîne. Avec l’imprimante 3D, il a pu créer un support de génératrice, qui n’existait pas dans le commerce. Il l’a dessiné, et il l’a imprimé. Sa machine est unique au monde : c’est lui qui l’a créée !”, indique l’enseignant.

« Apprendre à travailler ensemble »

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Technologie et impression 3D / Christophe Alasseur

Pour se lancer dans l’utilisation de l’impression 3D dans le cadre d’une séquence pédagogique, un professeur doit “penser différemment sa classe”, remarque Christophe Alasseur. “Qui dit impression 3D, dit gestion de différents groupes d’élèves : se lancer dans un tel projet avec une classe de 30 élèves implique de la diviser en 5 ou 6 équipes”, explique-t-il.

Ce travail de groupe permet en outre aux élèves “d’apprendre à travailler ensemble, à se répartir le travail, des tâches selon leurs compétences”. L’enseignant ajoute : “s’ils acceptent de collaborer entre eux, on peut aller très loin !”

« Prototypage rapide » et créativité

Imprimante 3d easy 120 / A4 technologie

Imprimante 3d easy 120 / A4 technologie

Pour lui, l’impression 3D permet aussi aux élèves de laisser libre cours à leur créativité. “Jusqu’ici, nous utilisions surtout l’usinage par enlèvement de matière, qui était limité et ne permettait pas, comme aujourd’hui de créer un objet avec n’importe quelle forme”, explique l’enseignant. “Désormais, il n’y a quasiment plus de limites”, ajoute-t-il.

Pour l’enseignant, cette technologie permet “de faire expérimenter les élèves sans passer par des maquettes commerce coûteuses, tout en sortant du virtuel pour qu’ils puissent tester concrètement leurs idées”.

Revenant sur le fameux “droit à l’erreur” qu’il apporte à ses élèves, l’enseignant conclut : “je n’évalue pas la fabrication : si une pièce imprimée ne fonctionne pas, je ne vais pas pénaliser son créateur, car je connais ses capacités. Ce que j’évalue chez l’élève, c’est sa démarche de chercheur.”

A noter que selon Christophe Alasseur, l’impression 3D pourrait “ouvrir les portes de l’interdisciplinarité, en tissant des liens avec les SVT, les mathématiques et les sciences physiques”.