Pour réaliser ses capsules, Nicolas Lemoine utilise des logiciels libres, comme Powtoon et Moovly.

Pour réaliser ses capsules, Nicolas Lemoine utilise des logiciels libres, comme Powtoon et Moovly.

“Dans un enseignement classique, on passe 80% du temps à faire du recopiage de cours, ou des choses de base qui pourraient se faire sans le prof. Les exercices d’application, eux, se font en fin d’heure, avec très peu de temps pour les réaliser”.

Ainsi Nicolas Lemoine, professeur de mathématiques au collège (REP) Liberté de Drancy (93), explique-t-il les motivations qui l’ont poussé, à la rentrée dernière, à se lancer dans la classe inversée.

« Inverser les temps de travail »

Objectif : “inverser les temps de travail”. Aidé par son collègue Loïc Asius, qui avait déjà établi ce système un an avant lui, il chamboule le fonctionnement de sa classe de 6e. “Au collège, les élèves font du travail de recherche, et à la maison, ils regardent le cours”, indique Nicolas Lemoine.

Nicolas Lemoine est en contact avec ses élèves grâce à Google +. Il interagit aussi en ligne avec eux via Facebook.

Nicolas Lemoine est en contact avec ses élèves grâce à Google +. Il interagit aussi en ligne avec eux via Facebook.

Les séquences pédagogiques sont découpées en capsules vidéo, que les élèvent visionnent le soir. “Au total, ils ont 1 capsule à visionner tous les deux soirs. Une séquence de 4 semaines équivaut à 10 capsules”, note l’enseignant.

Chaque groupe avance à son rythme

Pour vérifier que tout le monde a bien visionné et compris les capsules, le professeur de maths a mis en place un questionnaire en ligne, auquel les élèves doivent répondre après chaque vidéo.

“Ainsi, lorsque j’arrive en cours le lendemain, j’ai en tête les résultats de ces questionnaires. Je sais clairement qui a compris ou non le cours”, explique l’enseignant. Muni de ces informations, il peut diviser sa classe en 5 ou 6 petits groupes de niveau, des “îlots”.

Une capsule réalisée par Nicolas Lemoine, dans le cadre de sa classe inversée.

Une capsule réalisée par Nicolas Lemoine, dans le cadre de sa classe inversée.

L’enseignant apprécie le “gain de temps” et le “suivi individualisé” qu’il peut établir vis-à-vis de ses élèves. “Je ne perd plus 25 minutes à écrire au tableau, et ce temps gagné permet de doubler le temps de travail sur les exercices”, explique-t-il. Le professeur peut “circuler de groupe en groupe, et mieux connaître chaque élève”.

Chaque groupe “avance à son rythme”. Pour Nicolas Lemoine, “c’est une vraie différenciation. Je peux passer plus de temps avec les élèves en difficulté.” L’enseignant a pour projet de différencier aussi l’évaluation : “j’aimerais que les groupes puissent décider s’ils se sentent prêts à passer l’évaluation”.

« Le décrochage est retardé de 2 trimestres »

Les 6e de Nicolas Lemoine, divisés en îlots / Photo Twitter

Les 6e de Nicolas Lemoine, divisés en îlots / Photo Twitter

Les élèves ont-ils fait des progrès grâce à la classe inversée ? Avec son collègue, Loïc Asius, il constate que “le décrochage” arrive plus tard. “Dans une classe classique, le décrochage commence au début de la 4e, alors qu’avec la classe inversée, on gagne presque 2 trimestres”, remarque Nicolas Lemoine.

La raison tiendrait au fait que les élèves peuvent visionner les capsules autant de fois qu’ils le désirent. “Ils peuvent se permettre d’être inattentifs, revoir les vidéos si besoin, alors que dans un cours classique, le professeur ne reviendra pas en arrière. C’est un grand plus pour ceux qui ont des difficultés de mémorisation ou de compréhension !”, lance-t-il.

Des capsules très chronophages

Une capsule réalisée par Nicolas Lemoine, dans le cadre de sa classe inversée.

Une capsule réalisée par Nicolas Lemoine, dans le cadre de sa classe inversée.

Nicolas Lemoine pointe malgré tout du doigt quelques limites.

D’abord, le temps de conception des capsules, qui occupe ses soirées. “C’est très chronophage. Il faut faire un montage propre, penser le contenu de façon à ce qu’il soit réutilisable les années suivantes… l’équivalent d’une minute de vidéo prend une heure de travail !”, explique-t-il.

Ensuite, l’enseignant doute que “toutes les notions, notamment algébriques, puissent être assimilées via des capsules vidéo”.

Reste le temps de mise en place de la classe inversée. Au début, les élèves sont un peu perdus. “J’ai la chance d’avoir obtenu de l’établissement 30 minutes de plus de temps de classe, afin de pallier le temps perdu aux ajustements lors des premiers cours de l’année”, conclut Nicolas Lemoine.

Les vidéos de Nicolas Lemoine sont diffusées sur sa chaîne YouTube. Elles sont ouvertes à tous.

[warning]La ‘flipped classroom‘ concerne le primaire comme le secondaire, et peut faire l’objet d’un grand nombre d’applications pédagogiques. Cet article fait ainsi partie d’un vaste dossier sur la classe inversée, à découvrir ![/warning]