Incarner un rôle, avec une mission à accomplir, afin de mobiliser des savoirs et des compétences, tel est le concept des jeux de rôle sérieux. Professeur d’histoire-géographie en collège à Montpon-Menesterol (Dordogne), Olivier Quinet scénarise des tâches complexes, les transformant en jeux.
Durant l’année scolaire, l’enseignant organise 8 séances, qui durent chacune 2 heures, en histoire, géographie ou éducation civique. “Les élèves sont répartis dans des groupes. Il y a un travail très sérieux à réaliser, mais sous la forme d’un petit jeu de rôle, type ‘vous êtes le héros’”, décrit-il.
« Rentrer dans la tâche complexe » grâce à un scénario

Pour plus de réalisme, Olivier Quinet conçoit des documents et des objets permettant de se plonger dans une « mission » historique.
Cette scénarisation permet aux adolescents “de rentrer dans la tâche”. Pour plus de réalisme, des objets peuvent être fabriqués.
Ainsi, Olivier Quinet a conçu une tâche complexe, “Le Congrès de Tours”, durant laquelle “les élèves jouent le rôle d’officiers de police, en 1920, qui vont espionner les membres du SFIO”. “Pour le côté jeu de rôle, j’ai fabriqué de fausses fiches de police… Ils ont l’impression d’avoir entre les mains les vrais documents de la préfecture de police de l’époque”, ajoute le professeur.
Les groupes se voient remettre un dossier, composé de documents, et disposent de 2 heures pour rechercher, en s’aidant d’Internet, les éléments qui leur manquent pour réaliser leur “mission”.
Un jeu qui « change du travail purement écrit »
Pour scénariser ses tâches complexes, “il faut plus ou moins de temps : pour rendre les scénarios réalistes et véridiques, j’effectue beaucoup de recherches documentaires. Mais cela reste beaucoup plus rapide et simple à créer qu’un jeu sérieux numérique !”, précise l’enseignant.
Pour Olivier Quinet, la transformation de tâches complexes en jeu de rôle permet d’adopter “la démarche par compétences : l’élève est autonome, il est obligé de travailler en groupe, et de mobiliser son savoir-faire pour répondre à une problématique”. A la fin, il réalise une production – qui peut prendre la forme d’un texte, d’une vidéo ou même d’une BD.
“Ce genre de jeu change du travail purement écrit, et les élèves s’investissent plus. Cette forme de pédagogie active permet de retenir beaucoup plus de choses”, indique Olivier Quinet.
Une mission à accomplir, des choix à prendre
Dans la petite ville de Saint-Affrique (Aveyron), Lucile Peyre, enseignante de philosophie en terminale, utilise des jeux de rôle depuis 6 ans. Il s’agit, là aussi, de séances pendant lesquelles les élèves sont en petits groupes, avec un scénario et une mission à accomplir.

Pour plonger ses élèves dans le scénario du « jeu de l’île », Lucile Peyre leur fait aussi visionner un épisode de la série Lost, qui aborde une question philosophique en lien avec le programme.
A titre d’exemple, la professeure a intégré deux jeux à la partie du programme de terminale sur la philosophie politique. Afin de confronter les idées de Thomas Hobbes et de Jean-Jacques Rousseau, le “jeu de l’île” projette les élèves dans un scénario où “ils sont naufragés sur une île déserte, et où ils essaient de s’organiser, en fonction de situations leur posant des dilemmes moraux”, explique Lucile Peyre.
Au lieu d’utiliser des dés et de se laisser guider par le hasard, les élèves sont confrontés à des situations imaginées par leur professeure, pendant lesquelles ils doivent faire des choix (qu’ils devront justifier ensuite).
« La philosophie politique devient plus concrète »

En jouant à « l’atelier zombies », les élèves de Lucile Peyre s’imaginent sans doute dans la série « Walking Dead ».
Dans un autre jeu, “l’atelier zombies”, les élèves ont survécu à une épidémie qui a transformé de nombreuses personnes en zombies. “Ils sont cachés dans un laboratoire, où ils doivent trancher des dilemmes moraux, comme le fait de mettre un autre groupe de survivants en danger afin de se protéger”, décrit l’enseignante.
Pendant les jeux de rôle, les élèves prennent des notes. “A la fin, ils débattent de leurs décisions et de leurs réactions face à certaines situations, que je compare aux idées et aux textes de penseurs comme Aristote, Hobbes, Rousseau ou Kant”, indique Lucile Peyre. Ainsi, “la philosophie politique devient nettement plus concrète et motivante, parce qu’ils ont vécu personnellement certaines situations abordées dans le cours”, ajoute-t-elle.
[warning]Parce que les jeux sérieux peuvent être utilisés en SVT, en techno, en histoire-géo, en secondaire ou en primaire, sous la forme de jeux vidéo, de jeux de plateaux ou de jeux de rôle, cet article est le 9e épisode d’une série qui vous entraînera dans le vaste univers du ludo-éducatif.
Episode 1 : Les serious games à la maternelle : un jeu d’enfant !
Episode 2 : Serious game en SVT ou en techno : le ludique au service des sciences
Episode 3 : Les jeux sérieux, un support pour les professeurs documentalistes
Episode 4 : Jeux sérieux en histoire-géo : un outil d’immersion pour les élèves
Episode 5 : Serious gaming : détourner des jeux vidéo à des fins pédagogiques
Episode 6 : Serious gaming : les jeux vidéo, une “porte d’entrée” vers l’Histoire
Episode 7 : Mathador : un jeu pour comprendre la valeur des nombres
Episode 8 : Serious games : ils ne sont pas que numériques !
Episode 9 : Serious games : des jeux de rôle pour rendre les cours concrets
Episode 10 : Comment motiver des élèves ? En leur faisant créer des jeux vidéo ![/warning]
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