enseignant collège

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Une nouvelle prime de 300 euros par mois pour les enseignants de l’éducation prioritaire. Selon RTL, le Premier ministre Manuel Valls envisagerait de mettre en place ce coup de pouce supplémentaire pour les professeurs qui resteraient au moins huit ans dans un établissement classé en zone prioritaire (REP et REP+). Selon nos informations, il ne s’agirait non pas d’une prime, mais d’accélérer l’avancement de carrière des enseignants de l’éducation prioritaire, en leur attribuant un Grade d’accès fonctionnel (GRAF), selon des modalités qui restent à définir. En clair, les enseignants ayant exercé un nombre d’années « significatif » dans un établissement difficile accéderaient à ce grade, synonyme de bonus financier. L’objectif reste inchangé : attirer et fidéliser les enseignants, là où les besoins et le turn-over sont les plus importants.

Un « GRAF » et des questions

Frédérique Rolet, co-secrétaire générale du Snes-FSU, majoritaire dans le second degré, rappelle que la proposition d’ouvrir le GRAF aux enseignants n’est pas nouvelle. Elle émane des groupes de travail mis en place par l’ancien ministre de l’Education Vincent Peillon, en 2013, pour redéfinir les contours du métier d’enseignant. Frédérique Rolet précise par ailleurs qu’il existe déjà l’ASA (avantage spécifique d’ancienneté), attribué aux personnels ayant exercé au moins trois ans en zone d’éducation prioritaire : « je ne suis pas hostile à ce que les enseignants puissent accéder au GRAF, mais dans quelles conditions ? »

Les principaux syndicats enseignants restent prudents et estiment que de nombreuses questions restent en suspens. « Comment accédera-t-on au GRAF ? En fonction de missions spécifiques ? Pourra-t-on en perdre le bénéfice si l’on n’exerce plus en zone d’éducation prioritaire ? », s’interroge Christian Chevalier, secrétaire général du SE-Unsa. Pour Frédéric Sève, secrétaire général du Sgen-CFDT, « les discussions avec le ministère de l’Education nationale doivent démarrer très vite car il s’agit d’une revendication qui date de 2013 ! »

2312 euros/an en plus pour les profs en REP+

Actuellement et depuis un décret de 2011, les enseignants de l’éducation prioritaire perçoivent une indemnité annuelle de 1156 euros, soit près de 100 euros par mois. Le montant de ce bonus sera augmenté de 50% en 2015 pour les enseignants en REP, et il sera doublé pour ceux en REP+. Des incitations suffisantes pour rendre les établissements sensibles attractifs ? « 2300 euros, ce n’est pas une paille, c’est un vrai effort », reconnaît Christian Chevalier, « mais il ne faudrait pas que cela occulte le problème de la revalorisation générale du métier que l’on ne voit toujours pas venir ». Pour d’autres, le montant reste insuffisant pour avoir de réels effets sur les demandes de mutation.

« L’argent ne fait pas tout »

Nicolas, professeur de mathématiques en REP+, tient aussi à rappeler qu’une prime en chasse souvent une autre : « actuellement, je touche 98€ par mois de prime ECLAIR, plus une part modulable distribuée en août par le chef d’établissement en fonction de l’investissement et des projets réalisés par chaque enseignant, d’environ 600 euros en moyenne. A partir de la rentrée prochaine, cette part modulable est supprimée comme les réseaux ECLAIR disparaissent, ce qui minore les gains promis par la prime doublée en REP+ ». Surtout, insiste-t-il, « l’argent ne fait pas tout. Nos élèves et nos conditions sont trop difficiles moralement et physiquement sur le long terme pour rester, même en contrepartie d’une belle rémunération. »

Frédérique Rolet du Snes-FSU va dans le même sens : «  Les indemnités seules ne suffisent pas. Les enseignants de l’éducation prioritaire réclament avant tout de meilleures conditions de travail et moins d’heures de cours. » Ils seront entendus, au moins en partie, puisqu’une décharge d’1h30 environ par semaine est prévue dans le second degré en REP+, pour les professeurs à temps complet.