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Favoriser l’interdisciplinarité et la « liberté pédagogique » des équipes : en janvier dernier, la ministre de l’Education Najat Vallaud-Belkacem présentait en ces termes l’esprit de la future réforme du collège, qui sera dévoilée demain en Conseil des ministres. Elle avait notamment annoncé la mise en place d’ « enseignements complémentaires dans lesquels plusieurs disciplines pourront se croiser ».
Les horaires disciplinaires inchangés
Selon l’AEF, le projet de réforme prévoit que les chefs d’établissement pourront décider de la répartition de 20 % des dotations horaires globales, pour organiser l’accompagnement personnalisé, les activités en effectifs réduits et les « enseignements complémentaires ». Ces derniers prendront la forme de modules, dispensés par les enseignants sur leur horaire disciplinaire, qui ne variera pas. Ainsi, explique Claire Krepper, du SE-Unsa, « un enseignant de français qui choisira de s’investir dans les enseignements complémentaires dédiera une partie de son service à un travail thématique ou bien à un projet avec un autre enseignant. Cela étant, les élèves auront toujours des heures de français, mais en travaillant autrement ». Sur les quelque 25 heures de cours hebdomadaires d’un collégien, 4 pourraient être consacrées à ces enseignements complémentaires (3 en 6e, où l’emploi du temps est plus chargé). Le nombre d’heures de tronc commun par élève sera quant à lui modifié.
D’après Francetvinfo, 6 à 8 thèmes seront définis par le ministère pour les projets interdisciplinaires, par exemple le numérique, le développement durable ou le « parcours citoyen ». Ainsi, « on peut imaginer que les professeurs de français, d’arts plastiques et d’éducation musicale travaillent ensemble » sur la thématique du « parcours citoyen », indique le secrétaire général du SE-Unsa, Christian Chevalier.
Une seconde langue vivante dès la 5e
Autre mesure prévue, selon BFMTV, l’enseignement d’une seconde langue vivante dès la 5e, à raison de 2 heures par semaine. D’après Francetvinfo, il s’agirait non seulement d’amener les élèves à maîtriser une seconde langue dès la sortie du collège, mais aussi de limiter les contournements de la carte scolaire. Certains parents inscrivaient en effet leur enfant en classe européenne ou bilangue pour leur permettre d’éviter leur collège de secteur ou bien d’accéder à un établissement ayant meilleure réputation.
Les syndicats mitigés sur l’interdisciplinarité
Ces premiers échos ont suscité quelques vives réactions chez les syndicats, notamment en ce qui concerne les modules d’enseignements complémentaires. Certains, comme le Snes, défendent en effet les disciplines et ne souhaitent pas voir baisser le nombre d’heures du tronc commun. « Nous refusons d’enlever des heures de tronc commun pour faire des ‘machins’ qui ne seraient pas communs à tous les élèves et dont on ne sait comment ils seront évalués et quels professeurs les dispenseront », proteste ainsi le co-secrétaire général Roland Hubert, cité par l’AEF.
« Bien sûr, il va y avoir une période où l’on entendra dire que ‘des postes vont être supprimés à cause de la réforme du collège‘, que ‘les maths dans le tronc commun, c’est fini’ etc », souligne Frédéric Sève, du Sgen-CFDT. « Le ministère peut s’attendre à un an et demi de grève d’ici à l’entrée en vigueur de la réforme ». Pour lui, il faut donc miser sur « l’accompagnement des équipes pour les préparer à ces changements ».
La LV2 en 5e plutôt bien accueillie
L’enseignement d’une seconde langue dès la 5e provoque moins de remous. Sur BFMTV, la co-secrétaire générale du Snes Frédérique Rolet indique ne pas être hostile à l’idée, « au contraire, puisque la LV1 va être enseignée dès le primaire de manière systématique à la prochaine rentrée ». Elle s’interroge toutefois sur l’avenir des classes européennes et bilangues dans le cadre de cette nouvelle mesure. « On ne sait pas ce que vont devenir ces dispositifs », affirme-t-elle.
Elle souligne également dans le Figaro qu’avec cette mesure, le ministère risque « de manger tous ses moyens pour la réforme du collège ». Ainsi, « il n’y aura pas de possibilité de dédoubler les classes en demi-groupes, par exemple, pour travailler sur un projet », craint-elle.
Les négociations officielles autour du projet débuteront demain. L’entrée vigueur de la réforme du collège est prévue pour la rentrée 2016, en même temps que les nouveaux programmes scolaires.
J’ai du mal à comprendre ce qui sera mis en place pour les enfants à besoin particulier (très forte dyslexie ou très fortes lacunes demandant un soutien fort). C’est pourtant le principal problème du collège actuel. Les élèves qui arrivent en 6ème avec des fortes lacunes en lecture et expression en sorte sans avoir rattraper leurs lacunes, avec des savoirs extrêmement faibles et une estime de soi détruite.
Je fais suite au commentaire de Viviane Micaud, qui à mon avis pose une question centrale de cette réforme: celle du temps de travail individualisé. Il est aussi possible d’envisager le problème autrement. La démarche de l’éducation nationale face au handicap a consisté ces dernières années à considérer que certains élèves appartenaient à des catégories particulières. Pour chacune de ces catégories (dyslexie, déficience visuelle, « précocité », etc.), une boîte à outil a été développée. Mais, outre que ces boîtes à outils ne sont pas toujours adaptées, le diagnostic est parfois moins évident qu’il n’y paraît. Peut-être faudrait-il retourner le problème, et considérer que chaque enfant a des besoins particuliers, qui peuvent être évalués de façon individuelle. A mon sens, le dispositif des « heures d’accompagnement individualisées » gagnera en pertinence et en efficacité s’il s’accompagne d’un tel changement de paradigme.
Je m’étonne de cette approbation générale de l’apprentissage d’une LV2 dès la 5ème. Tel que cela a été présenté, qui pourrait en effet être contre ? Mais cela pose beaucoup d’interrogations. Que devient l’allemand en LV1 ? Réduire la LV1 en 6ème de 4h à 3h hebdomadaires puisque les élèves auront appris une langue vivante en primaire : qui peut nous garantir que l’apprentissage des langues fait par un professeur des écoles est fait tout aussi bien qu’un professeur de langue ? Apprendre une langue dès la 5ème à raison de 2h par semaine : est ce suffisant pour apprendre une langue ? Le disparition des classes bilangue aura forcément des conséquences sur les postes des professeurs déjà très précaires pour certaines matières.A cela s’ajoute la suppression des sections européennes et joue sur les quotas horaires des enseignants de lycée. L’argument de dire que cela permet à certains parents de contourner la carte scolaire : il en va de même pour les options CHAM – musique, les sections sportives de certains établissements, grec, etc. Les parents contournent la carte scolaire grâce à ces options.Cela veut-il dire que par souci d’équité il faille aussi les supprimer ?
La réforme n’est pas aussi idyllique et la Ministre « omet » de mentionner ces points pourtant incontournables, qui ont des conséquences et sur les élèves et sur les enseignants.
Depuis quelques années déjà, les collèges qui subissaient l’évitement des classes aisées et bobos (en ZEP puis REP) par contournement de la carte (et aussi par le recours aux collèges privés) avaient justement développé leur classes CHAM, leurs classes aménagées, et même très souvent leurs classes bilangues… Supprimer leurs classes bilangues à eux, c’est encourager davantage encore l’évitement de ces collèges ! Si les collèges mal situés ne peuvent plus faire de différence positive, contre-réactive par leur offre de formation et si les collèges publics sont égalisés et nivelés de cette manière dans leurs offres, on va accentuer encore plus l’évitement des collèges à fréquentation jugée trop populaire par les bobos riches ou fauchés.
Je suis consternée par les propositions faites pour apprendre les langues vivantes. C’est encore une fois du nivellement vers le bas ! Ouvrons les yeux, ne mettons pas tous les enfants dans le même moule. Pourquoi priver les enfants qui aiment les langues vivantes de pouvoir apprendre deux langues dès la 6 ème ? Pourquoi supprimer les classe européennes, qui permettent aux collégiens de pratiquer la langue de façon différente ? Arrêtons de rêver. Ce n’est pas avec 2h par semaine qu’une classe de 25 collégiens va réellement apprendre quelque chose. Ce n’est pas sérieux !
La carte scolaire vaste débat ! Concrètement je souhaite que ma fille fasse de l’allemand, or le collège de secteur (zone périurbaine) n’en propose pas. Où est l’égalité des chances ? Faut-il habiter dans les beaux quartiers pour avoir le droit d’en faire ? Une idée astucieuse serait de mutualiser les langues sur plusieurs collèges proches, dans un faire une classe bilangue allemand, dans le second bilangue espagnol, et dans l’le troisième bilangue italien. Tout le monde y trouverait son compte !
Personnellement je vais très probablement envoyer ma fille à contre coeur dans le privé…qui est aussi géographiquement éloigné, et lui offrir tous les ans un séjour linguistique. C’est la seule solution pour que nos enfants puissent parler les langues étrangères mieux que nos hommes politiques…et que l’on arrête de dire que les Français sont nuls en langue.
Avec cette réforme qui nivelle une fois de plus par le bas, les collèges privés ont de beaux jours devant
eux, quelque soit la condition sociale des parents.
Heureusement que ces derniers savent faire preuve de bon sens et verront où se situent les intêrêts de leurs enfants.
Egalité des chances qu’ils disaient…….
Tout à fait de votre avis, une fois de plus on préfère pousser les enfants vers le bas.
Il est très difficile d’être un bon élève au milieu d’une classe difficile (remarques et insultes quotidiennes, niveau bas pour que tout le monde suive …)
Avec cette réforme les parents aisés vont privilégier le privé et les autres seront jetés en pâture aux élèves perturbateurs.
Bravo à tous ces politiciens qui ne sont pas du tout concernés par cette réforme , redescendez de vos sièges dorés, faites donc un petit tour dans les collèges, consultez les parents, vous comprendrez peut-être le malaise.
Il est plus difficile d’être un bon élève au collège actuellement qu’un élève perturbateur. C’est peut-être là qu’il faudrait changer quelque chose non ?…
l’école privée donne plus de chances aux collégiens entre séjour linguistique, pas d’absence de professeur, ou remplacement immédiat lorsqu’un prof est malade, pas de grève et une discipline , je ne changerai pas de choix pour mon enfant, car il est heureux d’aller au collège.
C’est certain, mais les collèges privés sous contrat pourront-t-ils conserver les classes bilangues en 6eme ?
pourquoi mettre en avant l’égalité des chances pour faire passer cette suppression des classes européennes alors que déjà à l’arrivée en 6ème des écarts phénoménaux se sont créés entre les enfants ! le nivellement vers le bas ne nous aidera pas à améliorer notre niveau en langues étrangères.
Comment des enfants qui ne maitrisent pas le français en 6ème vont-ils apprendre 2 langues étrangères en 5ème ? J’aimerais tant que cela soit possible mais cela semble tellement utopique.
je vous fais part de la réflexion d’un professeur d’italien en conseil de classe (en seconde) « je ne sais pas faire cours en même temps à des enfants qui ont 20 et d’autres qui ont 3 »
Continuons de niveler vers le bas sous prétexte d’égalité et nous régresserons tranquillement. Ou sera la motivation et l’intérêt de nos enfants à progresser. Et puis pour l’apprentissage des langues, on ne peut pas dire que nous sommes des champions en France. Régressons nous?Un exemple, mon enfant se débrouille bien en sport (qualification aux épreuves de cross, d’endurance… au niveau départemental, puis régional, puis national). Pour résumé c’est une de ses passions. Et bien en cours de sport, le prof lui donne une moyenne de 12/20 car il estime que cet enfant a des capacités et que pour ne pas le favoriser par rapport aux autres, il faut créer un autre barème. Sur certaines épreuves mon enfants a des performances au dessus de certains et des notes plus faibles que ces élèves ! Alors la oui, mais non….